Ce qu’il y a de bien avec les quelque 900 chroniques qu’Alexandre Vialatte (1901-1971) a données au journal La Montagne entre 1952 et 1971, c’est qu’elles se prêtent à la compilation (aux titres d’ailleurs délicieux : Éloge du homard et autres insectes utiles, Profitons de l’ornithorynque, L’Éléphant est irréfutable, Et c’est ainsi qu’Allah est grand…). En témoigne à sa manière cette réédition de son Bestiaire (Arléa, 2007), accompagné des dessins d’Honoré (1941-2015), où sont réunis une soixante d’extraits de chroniques dans lesquelles le monde animal se trouve évoqué. Un monde animal qu’il convient d’entendre ici dans un sens très large puisqu’aux côtés du mouton, de l’hippopotame, du porc-épic, de la mante religieuse et du gypaète barbu on trouvera le Russe, l’Italien, le Turc, l’homme, l’Auvergnat, la femme (qui « remonte à la plus haute antiquité »), et Alexandre Vialatte lui-même.
Il faut bien le reconnaître : dans ces pages, on en apprend peu finalement sur le règne animal. Ce qui n’empêche ni d’être surpris ni d’être amusé par le regard iconoclaste que le chroniqueur pose sur certains animaux : les girafes sont « couleur de papier peint, comme le guépard », le homard est « un animal paisible qui devient d’un beau rouge à la cuisson », et le meuglement du bœuf est « un brouhaha médiéval ».
Le Bestiaire d’Alexandre Vialatte tient surtout du cabinet de curiosités, ou alors d’un zoo d’un genre nouveau, revisité par la plume fantaisiste d’un auteur qu’il convient surtout de ne pas prendre au sérieux : « Il n’y aurait plus de loups. On a été bien ennuyé. D’autant plus que dans le dictionnaire on en trouve encore de très beaux. Il assure que le loup français naît le plus souvent à Angoulême. »
Didier Garcia
Bestiaire
Alexandre Vialatte
Dessins d’Honoré
Arléa, 168 pages, 11 €
Poches Bestiaire
juillet 2023 | Le Matricule des Anges n°245
| par
Didier Garcia
Un livre
Par
Didier Garcia
Le Matricule des Anges n°245
, juillet 2023.