Galsan Tschinag s’est vu confier par ses parents il le raconte dans le prologue la tâche d’être « l’enfant du peuple », celui qui devrait porter l’héritage culturel des Touvas de Mongolie, une minorité rivale des Kazakhs. Tschinag a pleinement tenu sa promesse puisque en 1995 il a conduit une caravane vers le berceau de ses ancêtres, au cœur du mont Altaï.
On peut peiner à entrer dans ce livre, qui déstabilise par sa forme hybride : la première partie est un récit, alternant temps du passé, et présent, tandis que la seconde partie est un journal de voyage tenu par l’auteur, qui raconte l’avancée de la caravane. Mais le lecteur se laisse ensuite prendre par ce que l’on découvre de cette tradition nomade, qui s’incarne notamment dans le lien étroit avec les éléments naturels et avec les bêtes, compagnons de route et néanmoins marchandises qu’il s’agit de préserver. Avec une langue sans apprêt, Galsan Tschinag écrit de belles pages sur cette attention portée aux animaux, comme devant cette chamelle dans les yeux de laquelle un des personnages lit « compréhension et incompréhension mêlées » et comprend que « l’homme a le devoir de saluer l’arrivée sur terre de l’animal et de le protéger comme son propre enfant ». Lentement, la caravane finit par atteindre son but, menée par Tschinag, qui aura dû se frayer un passage entre différentes embûches, matérielles mais surtout humaines ! Le lac Atschit, la frontière de Bajan-Ölgi… tous peuvent alors « penser au double sens du terme « notre terre » ». Reçu par une délégation de Touvas mais aussi accueilli, et donc reconnu, par une délégation kazakhe, Tschinag ne boude pas sa joie ni sa fierté, se comparant d’ailleurs sans complexe à… Moïse ! Mission accomplie en tout cas.
La Caravane de Galsan Tschinag
Traduit de l’allemand par D. Petit et F. Toraille
L’Esprit des péninsules, 186 pages, 18 €
Domaine étranger Terre promise
juin 2006 | Le Matricule des Anges n°74
| par
Delphine Descaves
Un livre
Terre promise
Par
Delphine Descaves
Le Matricule des Anges n°74
, juin 2006.