Du même ventre pourrait être un huis clos, s’étalant sur plusieurs années entre les trois enfants Claudel, Camille, Louise et Paul. La pièce est construite comme une machine à remonter le temps, puisqu’elle débute en 1943 à l’asile, Paul Claudel a 75 ans et Camille 79, pour se clore en 1886, la fratrie a dans la vingtaine d’années. Ce perpétuel flash-back semble vouloir plonger dans les racines même de ces deux destins incroyables, celui de Paul et de Camille, de cette douleur commune aux trois et de leur amour-haine. Il est également question du temps qui fige ou durcit les points de vue, malgré les complicités de l’enfance.
Le lecteur attaque la pièce en se demandant ce qu’il peut bien apprendre de plus sur la famille Claudel. Et pourtant il se laisse prendre dans ce trop plein de cris, de démesure, de rires aussi. Ce trio explore à lui seul trois directions à l’opposé les unes des autres : l’un cherche dans l’écriture et la foi, l’autre dans la sculpture explorera le sombre et la folie, la troisième qui aspire au mariage, à la vie de famille, basculera à la suite de son veuvage dans la dureté et l’insensibilité…
Chaque séquence est une tension, une bousculade. L’effet est peut-être renforcé par la démarche de Catherine Anne qui, après avoir étudié l’histoire de cette famille-là, s’en est détachée pour laisser libre court à son imaginaire et mêler ainsi réalité et invention, ce qui permet peut-être de mieux saisir la complexité des pulsions humaines. Ces trois destins ne peuvent pas laisser indifférent, ils sont comme un concentré d’humanité, prêt à exploser…
Du mÊme ventre de Catherine Anne
Actes Sud-Papiers, 116 pages, 16,50 €
Théâtre Chez les Claudel
juillet 2006 | Le Matricule des Anges n°75
| par
Laurence Cazaux
Un livre
Chez les Claudel
Par
Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°75
, juillet 2006.