Un livre

La Haye (procès de poutine) Proces De Poutine

de Sasha Denisova

Editions Solitaires intempestifs

Sasha Denisova est née en Ukraine. Dramaturge, metteuse en scène, romancière, scénariste, elle quitte Moscou dès le 24 février 2024 et reçoit le statut d’artiste à risque de l’Unesco. « Pendant ces mois (d’exil), j’ai réfléchi à ce qui pourrait nous donner de l’espoir, à moi et à ceux qui ont fui la guerre et qui espèrent la victoire. Un procès de Poutine et de son gouvernement était la plus grande attente. » Elle écrit donc La Haye, avec comme personnage central Gamine, une jeune fille qui note dans son journal les preuves à montrer au Tribunal pénal international. La pièce se veut une utopie documentée, prenant la forme d’un procès.
Nous sommes dans le désir de justice d’une enfant. Le procès a commencé, du moins dans son imaginaire. Ils sont dix coupables, dont Margarita Simonian propagandiste en chef de la télévision d’État, Prigojine et son fantôme, chef de Wagner, Choïgou, ministre de la défense, Sourovikine, ex-commandant chargé des opérations militaires en Ukraine, et bien sûr poutine qui a perdu pour l’occasion sa majuscule. Il y a quelque chose d’ubuesque et de cauchemardesque dans cette alternance de scènes entre les dix accusés qui essaient de se disculper en trahissant et en accusant leurs collègues, et les témoignages de soldats ou de civils sur les exactions commises, les pillages, les meurtres, les tortures, les déportations d’enfants. Les dix pouvant également discuter très trivialement sur la nourriture en prison, donnant la sensation d’être complètement déconnectés de la gravité des faits évoqués. La pièce est par moments drôle, le plus souvent glaçante.
Pour Galin Stoev qui a mis en scène La Haye en septembre 2023 : « Ce texte est une rencontre impossible entre Shakespeare et Monty Python. » La Haye est une œuvre nécessaire qui met des mots sur l’espoir d’une justice pour affronter la barbarie.

L. Cazaux

La Haye. Le procès de Poutine
de Sasha Denisova
Traduit du russe par Gilles Morel et Tania Moguilevskaïa
Les Solitaires intempestifs, 128 pages, 15 €