L’écrivain Pierre Autin-Grenier, tout plein de son tendre désespoir, aimait dire, écrire qu’il n’était pas un héros. Avec son huitième livre, Brigitte Giraud affirme elle « Nous serons des héros ». Contre vents et marées, mauvaises fortunes et avanies. Une autre forme de tendresse, de désir, de non-résignation. En se faisant la narratrice d’Olivio, un très jeune garçon, Brigitte Giraud révèle une fois de plus son talent à se glisser dans l’intime, les gestes infimes, ici l’enfance, ses rêves et ses chambardements, autant qu’à faire siennes les folies de notre monde, sociétés en mutation ou Histoire à vif, ici encore du Portugal à l’Algérie en passant par la France. Mine de rien, avec non pas légèreté mais sérénité, l’écrivaine laisse libre son écriture qui chemine dans une narration dépouillée de toutes afféteries. Comme toujours chez elle, il y a cette volonté de dire, de raconter au plus près, au plus juste.
Olivio tout gamin quitte le Portugal avec sa mère, direction la France. Plus tard, il comprendra ce que Salazar signifie, il comprendra aussi que son père est mort en prison. La mère et le fils sont recueillis chez des amis à Lyon. Il leur faut tout réapprendre, tout réinventer. Chercher du travail, aller à l’école, changer de langue, faire l’apprentissage du deuil, de la perte, famille et pays, mais surtout se rendre invisibles, baisser la tête, eux les étrangers, les réfugiés, ne pas frémir, ne pas répondre aux gestes et paroles racistes. Adolescent, Olivio le Portugais se trouve un copain, Ahmed l’Algérien. À deux, la cité est moins grise, la vie plus vaste. Ils seront des héros, pas des va-t-en-guerre, simplement des hommes en quête de dignité.
Martine Laval
Domaine français Nous serons des héros
octobre 2015 | Le Matricule des Anges n°167
| par
Martine Laval
Un livre
Nous serons des héros
Par
Martine Laval
Le Matricule des Anges n°167
, octobre 2015.