Alors qu’elle rêvait d’une carrière de musicienne (ayant même projeté d’étudier avec Schoenberg), encouragée par le succès de son premier roman (Lolly Willowes, 1926), Sylvia Townsend Warner (1893-1978) a construit une œuvre riche de huit volumes de nouvelles et de sept romans.
Deuxième de ses romans de jeunesse (1927), Une lubie de Monsieur Fortune prend rapidement les allures d’un conte (un peu à la manière de Yourcenar dans ses Contes bleus) : le révérend Timothée Fortune part sur l’île de Fanua, paradis situé en plein Pacifique, pour tenter d’y convertir des indigènes qui passent leurs journées à chanter et danser. Un an plus tard, il n’a converti qu’un seul consulaire, Théodore, un jeune garçon qui n’en continue pas moins de vénérer son idole en bois. Un soir, alors que ses travaux de missionnaire ne l’occupent plus depuis longtemps, et qu’un tremblement de terre secoue l’île, il perd sa foi protestante, et découvre l’idole de Théodore totalement détruite. Le jeune adolescent semble alors se laisser mourir, avant que la proximité de la mort ne lui révèle le prix de la vie. De son côté, trop conscient de son échec auprès d’îliens peu désireux d’abandonner leurs croyances, le prêtre prépare son retour sur le continent.
De bout en bout, grâce à une plume alerte et nourrie d’images, la lecture de ce roman reste plaisante. Tout juste se surprend-on à y découvrir des touches d’une naïveté qui déconcerte : « le ruisseau riait et s’élançait joyeusement vers la cascade » (Homère n’est pas bien loin). Mais le sujet oblige peut-être…
Une lubie de Monsieur Fortune
de Sylvia Townsend Warner
Traduit de l’anglais par Denise Getzler
Gallimard, « L’imaginaire » - 236 pages, 8 €
Domaine étranger Un pasteur au paradis
septembre 2003 | Le Matricule des Anges n°46
| par
Didier Garcia
Un livre
Un pasteur au paradis
Par
Didier Garcia
Le Matricule des Anges n°46
, septembre 2003.