Poète (La Vie promise, Gallimard 1991), Guy Goffette taquine aussi la prose (Verlaine d’ardoise et de pluie, Gallimard 1995) avec un même bonheur. Encore que le mot « bonheur » ne soit guère adéquat à définir l’univers de cet écrivain. Pour preuve ce court récit, embourbé comme un air de blues sous « un ciel plus souvent bas qu’à son tour ». L’Ami du jars raconte trois fois rien : la solitude d’un homme au désir trop vaste dans un village à l’horizon trop petit. Un homme qui, comme chacun, a laissé derrière lui son enfance et ne s’en remet pas. Un homme dont « le coeur tout à coup s’est mis à marcher plus vite que (ses)jambes derrière une fille aux yeux de myosotis, plus grande que (ses) rêves. » Alors, le blues il le chante, chaque matin, le long de « la route noire ». Et voilà qu’un jour, il découvre un jars, animal acariâtre d’habitude, mais que le chant de l’écrivain fait danser derrière son grillage. Et de cette incongruité, Guy Goffette tire quelques pages d’une rare lumière sur la fraternité des solitaires. « Il n’y a pas de petite musique » conclut l’auteur. Il n’y a pas non plus de petite amitié et certains petits livres peuvent être grands.
L’Ami du jars
Guy Goffette
Théodore Balmoral, 40 pages, 65 FF
5, rue Neuve-Tudelle 45 100 Orléans
Domaine français L’Ami du jars
juillet 1997 | Le Matricule des Anges n°20
| par
Thierry Guichard
Un livre
L’Ami du jars
Par
Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°20
, juillet 1997.