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Domaine étranger Docteur Tolkien et Mister Smaug

novembre 2023 | Le Matricule des Anges n°248 | par Anthony Dufraisse

L’univers de Tolkien rime avec best-sellers. Mais connaît-on sa vie ordinaire ? Son biographe autorisé nous la raconte.

J.R.R. Tolkien, une biographie

Tout le monde ne peut pas imaginer tout un monde. Rares sont les vrais démiurges, ceux qui voient grand, tout en ayant, jusqu’à la folie, le goût du détail. J.R.R. Tolkien, sans doute « la » référence ultime de la fantasy, bien qu’il ne soit pas l’inventeur du genre, en est un. Comme l’écrivait très justement George R. R. Martin en introduction de l’ouvrage collectif Méditations sur la Terre du Milieu (Bragelonne) traduit il y a pile vingt ans : « Tolkien a changé la fantasy : il l’a élevée pour la redéfinir, à un point tel qu’elle ne sera jamais plus la même ». Le père du Trône de Fer a mille fois raison et c’est ce qui explique le culte dont jouit, cinquante ans après sa mort, le créateur des révérés Le Hobbit, Le Seigneur des Anneaux ou encore du Silmarillion. Publiée pour la première fois en France en 1980, la biographie que Humphrey Carpenter consacre à Tolkien connaît aujourd’hui sa troisième édition, et elle est passionnante. « C’est un curieux paradoxe que Le Hobbit et Le Seigneur des Anneaux soient l’œuvre d’un obscur professeur spécialisé dans le dialecte moyen anglais des West Midlands, et qui vécut une vie de banlieusard ordinaire entre ses enfants et son jardin », lit-on à peu près au milieu du livre. Tout l’intérêt du travail de Carpenter est là, dans ce paradoxe qui n’est peut-être qu’apparent si on veut bien se rappeler que, pour Tolkien, la vie menée par un écrivain et son esprit ne fonctionnent pas nécessairement, tant s’en faut, en miroir. Bref, on peut être un philologue pépère, affectionner les vestes en tweed et fumer la pipe tout en étant le père du redoutable dragon Smaug, user ses semelles imaginaires dans la dangereuse contrée du Mordor et orchestrer de tonitruantes castagnes rangées entre elfes et orques.
Pour Carpenter, qui est né en 1946 à Oxford, là même où Tolkien enseigna et vécut longtemps, on ne peut pas le comprendre si on ne revient pas au terroir, aux sentiers boueux de sa chère campagne anglaise. Au compagnonnage, disons, avec les arbres, dont les ramifications flexueuses le fascinaient tant. On ne peut pas cerner le personnage sans prendre la pleine mesure de l’attachement viscéral qui le liait aux siens, sa vie de famille avec sa femme Edith et leurs quatre enfants étant quelque part une terre d’enracinement. En évoquant les principaux événements de l’existence de Tolkien (dont l’expérience de la Grande Guerre), Carpenter entend mettre sur la table tous les éléments qui, tels ceux d’un puzzle, ont participé d’une façon ou d’une autre à la construction de son si fécond imaginaire. L’univers de Tolkien, ce que d’aucuns appellent sa mythologie, n’aurait par exemple jamais vu le jour s’il n’y avait d’abord eu une passion princeps pour les langues anciennes, le gallois médiéval, le finnois, le néogothique, toutes choses qui échappent à nos esprits twitterisés. C’est parce qu’il a étudié, puis élaborer ses propres alphabets qu’il lui a fallu, pour les faire vivre pleinement, créer tout un monde. Sa passion des langues a poussé Tolkien vers le récit pour que les mots qu’il inventait soient incarnés, endossés par des personnages. L’existence de ces langages fictifs, Carpenter en parle comme de « la raison d’être de toute la mythologie ». Il insiste : « En fait, l’invention des noms et le travail linguistique qui allait avec occupèrent son esprit au moins autant que les histoires elles-mêmes. »
Mari dévoué, père aimant, ami attentionné, professeur respecté, toutes les facettes de Tolkien nous sont présentées par un Humphrey Carpenter ayant mis à profit les écrits personnels de l’intéressé : sa correspondance, ses journaux, tenus par intermittence, et tous autres documents permettant d’éclairer la vie de son sujet et de « jeter quelque lumière sur ses livres ». Ce pourquoi on parle d’une biographie autorisée. Un des aspects les plus intéressants concerne enfin son cercle de sociabilité. À toutes les périodes de sa vie, Tolkien a entretenu des relations, certaines durablement mais seulement confraternelles, d’autres vraiment amicales, au premier rang desquelles celle avec son collègue l’écrivain C.S. Lewis. « Ce que je lui dois d’inestimable, ce n’est pas une ‘’ influence’’ comme on le comprend d’habitude, mais des encouragements. Il fut longtemps mon seul public », confiera Tolkien, devenu célèbre, qui n’aurait jamais imaginé avoir des millions de lecteurs un jour…

Anthony Dufraisse

J.R.R. Tolkien, une biographie
Humphrey Carpenter
Traduit de l’anglais par Pierre Alien
Christian Bourgois, 535 pages, 18

Docteur Tolkien et Mister Smaug Par Anthony Dufraisse
Le Matricule des Anges n°248 , novembre 2023.
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