Elles sont deux, Sol et Karima, propulsées par l’effet blast de leur engagement sur les terres de la librairie. Elles sont devenues éditrices il y a peu pour donner à la communauté des « lecteurices » la possibilité de rencontrer les écrits d’« auteurices » qui témoignent d’un souci politique tout en manifestant une recherche esthétique manifeste. Sur le fond, leurs engagements queer, anarchiste, féministe, antiraciste et anticapitaliste sont le socle de leur activité qui répond au besoin primordial de laisser à tous la liberté de s’épanouir sans contraintes. Comme l’écrit Alice Baylac, il s’agit d’opposer toutes les « forces d’amour » aux « formes de pouvoir ».
On a pu noter que vous ne mettiez pas toujours de capitale à votre marque éditoriale blast. Pourquoi ?
Ce choix s’inscrit pour nous dans une démarche d’histoire populaire. Nous ne sommes pas des enfants de la balle et il était important pour nous de marquer notre ancrage dans les questions de classe. L’absence de majuscule, pour nous, c’est aussi la volonté de faire de blast un nom commun, ordinaire, autour duquel faire communauté. Et c’est ce que nous essayons de faire avec les lecteurices, libraires, représentantes et surtout auteurices qui se connaissent, se lisent, échangent. Nous sommes traversées par l’envie de construire un espace accueillant, solidaire, conscient des dynamiques d’oppression, et plusieurs des auteurices avec lesquelles nous travaillons partagent cet engagement et ont également un ancrage dans une histoire populaire, qu’ielles retranscrivent dans leurs ouvrages. Cette question de majuscule, ou plutôt d’absence de majuscule se retrouve d’ailleurs chez certains livres et auteurices : Colza d’Alice Baylac ou le prochain roman de Baptiste Thery-Guilbert (à paraître à l’automne 2023), mais aussi le titre du recueil de Douce Dibondo, métacures, ou le nom de l’autrice du Souffle, lou dimay.
Qu’est-ce qui a déclenché votre envie de fonder une maison d’édition ?
La création de blast n’est issue ni d’un accident, ni d’un constat mais plutôt de nos parcours. Pas d’un accident, car c’est une décision réfléchie et pesée, même si on ignorait probablement beaucoup d’éléments du métier avant de nous lancer… Pas d’un constat non plus, car il existait (et existe toujours) d’excellentes maisons d’édition engagées, indépendantes, qui élaborent autour des lignes politiques qui sont également les nôtres.
De quel milieu professionnel émanez-vous ?
Nous venons des arts du spectacle, et c’est un milieu dans lequel il est difficile de lancer des projets : déficitaire, largement subventionné et parfois homogène (avec les mêmes spectacles qui tournent de scène nationale en scène nationale). Nous nous sommes donc posé la question de ce que nous souhaitions lancer, au croisement de nos sensibilités personnelles et de nos engagements. Il s’agissait pour nous de faire lien entre notre intérêt pour les arts et la littérature et notre...
Entretiens Telles quelles
mars 2023 | Le Matricule des Anges n°241
| par
Éric Dussert
Chez Blast la littérature est politique, concernée par les questions d’égalité et de liberté. Au catalogue sont abordés les thèmes de l’anarchie, du racisme, du féminisme, du genre.
Un éditeur