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Domaine français Foi et fureur

avril 2016 | Le Matricule des Anges n°172 | par Richard Blin

Avec Les Singes de Dieu, Patrick Wald Lasowski nous plonge au cœur des guerres de religion. Du côté de ceux pour qui tout est bon dès lors qu’il s’agit de terrifier.

De Dieu, Sade disait que son seul nom « a fait couler plus de sang sur la surface du globe que n’en fera répandre aucune guerre de politique ». C’est autour de ce pouvoir, que détient le mot Dieu de tuer, que se noue le deuxième roman de Patrick Wald Lasowski, après La Terreur (2014). Il y poursuit l’exploration romanesque de cet effrayant paradoxe qui veut que chacun croie bien faire en faisant aux autres tout le mal possible.
Le roman se déroule à Paris, en pleine guerre entre protestants et catholiques. Le royaume vit des années tragiques. La Réforme, malgré la répression a fait d’innombrables adeptes. De grands seigneurs ont ouvertement pris parti pour l’hérésie et contre les Guise qui inspirent le parti catholique. Complots, conjurations, massacres (Amboise, 1560) ont tourné à la guerre civile avec la Saint-Barthélemy, ce jour où « la mort de Dieu se mit en marche » (25 août 1572) décapitant le parti protestant et massacrant tous ceux qui étaient connus pour leurs convictions hérétiques.
Du haut de sa chaire, Jean Boucher, le curé de Saint-Benoît, et le recteur de la Sorbonne, tempête contre les calvinistes briseurs d’icônes, et contre Henri III, le nouveau roi « tout au plaisir de caresser ses favoris et d’en être caressé » au lieu de pourchasser l’hérétique. Considéré comme le plus habile prédicateur de Paris, Boucher fustige un roi qui s’amuse, s’exhibe en femme, vide le trésor, multiplie débauches et repentirs. « Outrances du plaisir, comédies du remords. » À ses côtés se tient Pierre Tison, un jeune moine capucin, son plus fidèle disciple, son secrétaire et confident. C’est lui qui raconte, nous fait vivre de l’intérieur l’enchaînement des événements qui vont conduire à la création de la sainte Ligue, ou Conseil des Seize, à son hégémonie puis à son effondrement dans le cadre de la lutte impitoyable opposant Henri III, Henri de Navarre et les Guise.
À la tête des Seize, Boucher, par ses sermons, attise la fureur du peuple. « Je les tiens à la gueule, et les tiens jusqu’au bout. » Ce sera la journée des barricades (mai 1588), la première dans l’histoire de Paris. Elle oblige Henri III à prendre la fuite. Le duc de Guise triomphe mais Henri III le fait assassiner, plongeant Paris dans la stupeur. On crie vengeance tandis que les Seize rêvent de remplacer la monarchie par une dictature théologique, une république théocratique. « L’État n’est rien s’il n’est le serviteur de la religion. » On prêche l’exaltation du martyr, la guerre sainte contre l’hérésie, on en appelle à l’exercice de la Terreur. On maudit, on dresse des listes où chaque nom est suivi d’une des trois lettres P, D ou C : « P pour pendre ; D, dagué ; C chassé », pour mieux répandre la peur dans le royaume. Contre l’hérétique, une seule loi : le soumettre, l’écraser, le détruire. Les sermons, supposés faire triompher la juste cause, ne cessent de légitimer la haine, la cruauté, la pratique du massacre.
Les Singes de Dieu, en nous immergeant dans les atrocités des guerres de religion, montre à quel point nous sommes démunis devant l’abominable, devant des croyances qui se résument à un choix entre vrai et faux, devant des sermons décidant de la vérité et s’abattant sur l’adversaire pour le détruire. Un étrange mélange de tout et de trop, de lumières et de ténèbres échappant à toute rationalité tant est effarante la disproportion entre les causes et les effets. Chacun s’identifie à son camp et en attend le salut de l’humanité. Le pire est qu’il est impossible de se rassurer en pensant que ces faits concernent des époques révolues, qu’ils se réfèrent à des croyances archaïques, à des fanatismes d’antan… Ce qui fait de ce livre une charge contre l’intégrisme de ceux qui, aujourd’hui, sous couvert de respect des textes religieux, conjuguent l’intolérance au terrorisme armé, pour mieux imposer leurs lois par la force et la terreur.
Richard Blin

LES SINGES DE DIEU
DE PATRICK WALD LASOWSKI
Cherche midi, 168 pages, 15,80

Foi et fureur Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°172 , avril 2016.
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