De tous les hymnes chantés lors de cette coupe du monde de rugby, celui de l’Afrique du Sud suscite le plus de sympathie. « Et c’est unis que nous serons/ Vivons et luttons pour que la liberté triomphe en Afrique du Sud, notre nation » ; les dernières paroles de Nikosi Sikelel’iAfrika enflamment les stades. Cet hymne composé de cinq langues (xhosa, zulu, sesotho, afrikaans, anglais) combine l’hymne afrikaaner de 1927 et le populaire chant africain anti-apartheid. Après des années de lutte, d’horreur, d’exclusion, l’harmonie entre les peuples apparaît donc enfin en marche… Ombre au tableau, les commentaires peu amènes sur le nouveau régime, d’écrivains sud-africains, jadis opposés à la politique dite d’apartheid. La revue Jeune Afrique les qualifie d’ « écrivains blancs broyant du noir ». Parmi eux, excusez du peu, André Brink, J. M. Coetzee, Nadine Gordimer, Rian Malan ou encore Christopher Hope. Si ce dernier lance avec Les Amants de ma mère un magnifique chant d’amour à l’Afrique, il n’en condamne pas moins, en Afrique du Sud, la violence qui sévit dans les villes, le parcage des élites friquées dans des quartiers de haute sécurité, le maquillage de certains faits historiques, la muséification, la grotesque et terrible propagande qui prétend que le sida peut être guéri avec des plantes africaines, la fermeture des frontières aux réfugiés politiques…
À travers les rapports d’une femme Kathleen Healey et de son fils Alexander nous survolons l’histoire de l’Afrique du Sud. Survolons car la mère pilote des avions d’un bout à l’autre de l’Afrique, chasse le gros gibier tout en étant poursuivie par une meute d’amants. Le fils, narrateur, s’est plus ou moins élevé tout seul avec en miroir un enfant noir que sa mère protège. Mère absente, excentrique, sans préjugés, Alexander adulte, voyagera lui aussi, proposant de par le monde des systèmes de climatisation. L’apartheid vacille, un régime politique nouveau s’installe. Le fils reviendra à Johannesburg accompagner sa mère dans son ultime voyage, observant d’un œil critique les changements, les compromissions, les impostures. D’une écriture ardente, vive, ponctuée d’éclairs de lumière et d’ombres mélancoliques, le roman regorge de formules décapantes mêlant auto-dérision, humour noir et jugements définitifs. « Nous sommes fêlés, dit ma mère. Nous sommes les descendants de mineurs que l’or a rendus fous. Avec à peu près autant de goût ou de jugement qu’on peut l’imaginer. Tout pour la frime. Que veulent les gens ? Ils veulent une mine d’or, six limousines et un énorme château dans les banlieues, avec une clôture électrifiée, une grande piscine et un tas de fusils. C’est ce qu’ils veulent tout autant qu’ils sont. Les Noirs, les Blancs, les Asiatiques, les métis et les Chinois… Et ils le veulent tout de suite. Personne ne sait ce qu’il est censé être : tout le monde fait semblant, c’est du délire. »
Christopher Hope est né en 1944 à Johannesburg, la capitale mondiale de la dynamite....
Entretiens Balle à blanc
octobre 2007 | Le Matricule des Anges n°87
| par
Dominique Aussenac
Roman fleuve, le dernier ouvrage de Christopher Hope retrace cent ans de vies africaines, de relations entre noirs et blancs. Un livre nourri de passions, violent et sarcastique.
Un auteur
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