Journal des lointains N°1
Gulliver de Michel Le Bris ayant cessé de paraître, peu de revues se consacrent au récit de voyage. L’éditeur Buchet Chastel avec Le Journal des lointains comble cette lacune en militant « pour une littérature se fécondant au contact de l’ailleurs, de l’inconnu ». Sous la férule de Marc Trillard, ce premier numéro regroupe des textes inédits de quatorze écrivains qui privilégient « la vraie vie du dehors » sans exotisme, ni angélisme. Sami Tchak y raconte comment la magie d’une chanson populaire à la gloire d’un pays peut inviter au voyage, mais entraîner quelques désillusions sur un Tchad où l’on tue beaucoup, notamment pour l’honneur. D’Himalaya, d’Oulang Bator ou de Chine, Marc de Gouvenain, Linda Gardelle et Wei-Wei rapportent des portraits très sensibles comme celui de cette jeune nomade mongole, séduite et abandonnée par un Français, membre d’une organisation humanitaire. L’Europe peut révéler aussi des terra incognita ou méconnaissables comme le démontrent Björn Larsson en Italie et Éric Sarner à Berlin. Quant à Louis-Philippe Dalembert, il nous offre un retour amer dans un Haïti dévasté et occupé. « Voir un étranger botter, à la face du monde qui plus est, le cul à un Haïtien l’année même du bicentenaire de l’indépendance me choque plus que de raison. » Le texte le plus attachant est peut-être celui de Jean-Louis Kuffer. Dans le sillage de Cendrars, une rencontre de comptoir évoque les récits d’une institutrice suisse, Lina Bögli, qui en 1892 décida de parcourir le monde. Un semestriel grouillant de vies.
D.A.
Le Journal des lointains N°1
203 pages, 17 € (Buchet Chastel)