Oscillant entre réalité et farce, La Route du sang de Theo Hakola, roman à maturation lente, trouve une place réjouissante en dehors des cadres.
On connaissait Theo Hakola comme leader des groupes Orchestre Rouge et Passion Fodder, chanteur et musicien folk-rock, suivant depuis la séparation de Passion Fodder une carrière solo. On découvre aujourd’hui un écrivain. Plein à craquer, le livre de l’Américain ne tient pas en place. Rien d’étonnant, il a mis une vingtaine d’années à voir le jour dans sa version définitive. La structure narrative, complexe mais attirante, mène le lecteur sur plusieurs fronts. La Route du sang est un cheval fou, narrant les débuts du syndicalisme aux États-Unis, avant de s’ancrer dans la guerre d’Espagne et de suivre la vie d’un Américain à Paris. L’auteur en profite également pour réactiver la figure de Zorro.
Édité aujourd’hui en français, dans une traduction établie par l’auteur (assisté par E. Bayamack-Tam), ce livre, à l’image de l’homme qui l’a écrit, se révèle un mélange de révolte et de rigueur, d’extravagance et d’élégance.
Vous publiez un premier roman après plus de vingt ans passés dans l’univers de la musique. Quelle place occupe La Route du sang dans votre démarche artistique ?
La Route du Sang est parfaitement intégré dans ma démarche. Il s’agit d’une même et longue histoire. Le roman a mûri et a été construit parallèlement à la musique. Parfois, des chansons ont puisé leurs thèmes ou leurs personnages dans le roman. Il n’y a pas de rupture entre les deux.
La Route du sang a-t-il été publié en langue originale ?
Si La Route du Sang a mûri vingt ans, je l’ai mis de côté pendant neuf ans. Du moment où j’ai commencé la musique jusque 1989, je l’ai à peine touché. De temps en temps, je le montrais à quelqu’un. J’ai confié une première version à une Anglaise qui travaillait comme agent littéraire à New York. Sa réponse était très positive mais elle n’a pas réussi à placer cette première version aux États-Unis. Je l’ai reprise ensuite, car je n’en étais pas satisfait. Quand j’ai terminé la seconde version, j’étais sur le point de quitter Los Angeles pour revenir vivre à Paris, en 1995.
Existe-t-il pour vous des liens entre composition musicale et composition romanesque ?
C’est fait dans le même esprit mais c’est cent fois plus difficile d’aboutir à un roman. Une chanson, on peut peiner un peu mais souvent, c’est réglé au bout d’une semaine.
Il y a un désir de suivre un rythme dans le roman, comme dans une chanson ou plutôt comme sur un album. Je travaille beaucoup l’ordre de mes chansons. J’ai envie qu’on écoute le disque d’un bout à l’autre, fort. Le roman, c’est un peu ça. Au lieu de dire « écoutez fort », on pourrait dire « essayez de ne pas le lire par petits morceaux pour sentir le rythme ». Il y a aussi, comme dans la composition musicale, une recherche de rigueur. Même si le roman est plus massif, je considère la musique avec autant de...
Entretiens L’essence de la vie
août 2001 | Le Matricule des Anges n°35
| par
Benoît Broyart
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