Dès le titre du recueil, Olivier Barbarant donne le ton : Odes dérisoires souligné d’un « et quelques autres un peu moins ». L’auteur, pense-t-on, va donc y parler de choses sans importances ou du moins sans que l’on y prête attention, et c’est là une grave erreur. Car le poète avoue « mes émotions sont dérisoires et j’y tiens ». S’il a choisi une forme désuette, l’ode, tout en s’accordant une certaine liberté dans la forme (le vers est libre, et les strophes sont irrégulières), le lyrisme qui s’en dégage est digne des grands auteurs du passé, réactualisé dans la vie moderne, où chaque poème nous offre des tranches de vie, comme si l’auteur nous racontait de petites histoires : « Voici le théâtre posé sur la Place Salvador Allende/ Naguère on connaissait le nom/ Désormais c’est un long dallage dédié à l’exotisme/ Une affaire de Brésilien j’ai de l’or au mieux un héros d’opéra/ Pour les jeunes gens qui glissent devant/ Casquettes à l’envers leurs rires pour tout requiem ». Olivier Barbarant nous propose des souvenirs d’enfance teintés d’une certaine nostalgie, d’un tour de manège : « Quand cela tourne en bout de ligne c’est comme aux chevaux de bois/ On crie Maman est-ce que tu me vois/ Sans comprendre que le virage a déjà dévoré nos rires ». Professeur à Saint-Quentin, l’auteur né en 1966, s’interroge en s’inspirant de son quotidien : « Jeunes gens l’avenir devant vous est couleur de charbon/ Et je suis chargé cinq à six heures hebdomadaires de vous fournir des songes ». On sent le regard plein de tendresse du poète, impuissant devant le destin tragique de ces existences futures. A la lecture de ce livre, on décèle l’influence d’Aragon, l’auteur ne s’en cache pas car il lui dédie plusieurs odes et retrace également quelques épisodes de sa vie. Olivier Barbarant, qui a d’ailleurs publié un essai Aragon, la mémoire et l’excès, vient de recevoir le prix de poésie Tristan Tzara 1999 pour ce livre qui nous fait tout simplement passer du dérisoire à l’essentiel.
Odes dérisoires
Olivier Barbarant
Champ Vallon
124 pages, 85 FF
Poésie Du dérisoire à l’essentiel
août 1999 | Le Matricule des Anges n°27
| par
Stéphane Branger
Un livre
Du dérisoire à l’essentiel
Par
Stéphane Branger
Le Matricule des Anges n°27
, août 1999.