Enfant, Gregorio voit son grand-père « disposer sur la table des liasses de billets de banque ». Son destin s’en trouve définitivement scellé. L’argent devient le moteur de son existence. Désireux de faire fortune, il entame au début du siècle, un long périple. Europe, États-Unis, les kilomètres lui donneront l’occasion de rencontrer des personnages étonnants.
Après La Lettre à un adolescent sur le bonheur(Arléa, 1995), Franco Ferrucci, né à Pise en 1936, propose un texte de moraliste, où il démontre la toute puissance du billet de banque.
La forme romanesque est-elle pour autant un prétexte ? Si Ferrucci pénètre souvent dans le récit - « L’amour, par exemple, est une espérance, et la haine une crainte ; et le seul moyen de tenir les rênes de l’imagination est d’opter pour une manière de vivre qui ne réserve aucun motif de crainte ou d’espoir », il prend également plaisir à la fiction et réserve de belles rencontres à ses personnages : Gregorio découvre Dana, endormie dans un train dont il doit réceptionner la marchandise.
Un amour singulier oscille toujours entre la tentation de démontrer et la joie de conter. Le propos bute parfois sur des situations trop artificielles. À Berlin, Gregorio fait la connaissance de Kurt, personnage « diabolique », « grand chambellan » de l’argent (très proche du Kurtz de Conrad). Il initiera Gregorio au profit durant la Première Guerre mondiale qui se révèle être un véritable « face-à-face économique ».
Il manque un univers au roman de Ferrucci. La fiction semble être le résultat d’une démonstration et la forte présence de l’auteur nous force à garder nos distances.
Benoît Broyart
Un amour singulier
Franco Ferrucci
Traduit de l’italien par François Rosso
Arléa, 192 pages, 98 FF
Domaine étranger Billet, deuxième classe
juillet 1997 | Le Matricule des Anges n°20
| par
Benoît Broyart
Un livre
Billet, deuxième classe
Par
Benoît Broyart
Le Matricule des Anges n°20
, juillet 1997.