Pour décrire le monde actuel dans son chaos, Petr Kral use d’un verbe poétique à la fois simple et brutal, comme s’il fallait se résoudre à ce que la langue ne puisse plus voiler la misère. Dans cette écriture épurée, les métaphores n’en sont que plus saisissantes : hier « le vent se levait repoussait les vivants vers la/tombe », aujourd’hui il pleut des « couteaux liquides » et le soleil « attaque au marteau-piqueur ». Et le pire reste sans doute à craindre : « il faudrait aussi s’adresser à maman, déjà prête à/partir,/la retenir d’une main tendre comme une jeune/mariée, la raccompagner à la fin des vacances d’autrefois ». Avec son stylo-caméra, le poète survole les ruines où notre siècle agonise, fouille « la glaire fade des dimanches », exhume des morts qui tassent « leurs petits rires/dans un wagon de brume ». Après les proses d’Arsenal et les poèmes de Le Droit au gris, un De profundis sans larmes ni éclats de voix, comme une confidence douloureuse.
Quoi ? Quelque chose et autres poèmes, de Petr Kral
Obsidiane
108 pages, 80 FF
Poésie Quoi ? Quelque chose et autres poèmes
novembre 1995 | Le Matricule des Anges n°14
| par
Didier Garcia
Un livre
Quoi ? Quelque chose et autres poèmes
Par
Didier Garcia
Le Matricule des Anges n°14
, novembre 1995.