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Textes & images Un zaïmph tout neuf

octobre 2022 | Le Matricule des Anges n°237 | par Éric Dussert

Réédition de la rutilante version de Salammbô illustrée par Suzanne-Raphaële Lagneau, artiste oubliée des années Art déco.

C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar.
Les soldats qu’il avait commandés en Sicile se donnaient un grand festin pour célébrer le jour anniversaire de la bataille d’Eryx, et comme le maître était absent et qu’ils se trouvaient nombreux, ils mangeaient et ils buvaient en pleine liberté. »

Parmi les plus célèbres de la littérature française du XIXe siècle, les deux premiers paragraphes de Salammbô de Gustave Flaubert ont pris dans leurs rets la plupart des artistes depuis sa parution, en 1862, chez Michel Lévy, après que son auteur, lassé par sa Bovary, souffrait de « prurits d’Orient ». Pour bâtir une épopée sur un sujet « vaste et propre », il se rend sur place entre avril et juin 1858 après avoir longuement enquêté au Cabinet des Médailles de la Nationale où sont conservées les monnaies et terres cuites assyriennes, ou avoir interrogé l’archéologue Félicien de Saulcy. Son roman a pris des allures de monument antique. S’il considérait qu’il n’était pas « illustrable », le deuxième roman du maître styliste aura probablement été le plus illustré, justement, de toute la production de son temps. La démesure du livre qui s’ouvre sur un banquet formidable, et se poursuit par les combats de la guerre des Mercenaires des guerres puniques et une fameuse quête amoureuse avait de quoi exciter les imaginations artistes. D’autant qu’un terrible envoûtement émane du « zaïmph » de Tanit, ce voile métamorphique échu à Salammbô – qui disparaît toujours derrière la description de ses vêtements. Depuis Victor-Armand Poirson (1887), l’Italien Glauco Cambon (1906) jusqu’à la trilogie extraordinaire de Philippe Druillet (1980) qui a su tirer Carthage vers des étoiles anticipatoires, en passant par Schmied (1927), Rochegrosse (1900) ou bien encore Mucha (1896), ils sont légion les peintres et les illustrateurs qui ont succombé aux charmes de la belle et de la cité arasée.
Une seule femme aura donné sa version de Salammbô, la peintre Suzanne-Raphaële Lagneau (1890-1985) pour l’éditeur Cyral en 1928. Accumulant les pourpres sans négliger ors, violets, verts et bleus, elle tient parfaitement sa place entre Mucha et Druillet : ses couleurs et son trait d’une modernité remarquable restituent à l’épique roman son flamboyant et ses audaces. Revu en pleine époque Art déco, le IIIe siècle avant Jésus-Christ lui convenait comme l’avaient inspirée Ramayana et Bhagavata Purana, les épopées indiennes par lesquelles la professeure de dessin de la ville de Paris entama sa carrière d’illustratrice d’œuvres littéraires : mythe et couleurs, souplesse allaient devenir sa marque. Bénéficiant d’un prix des Arts décoratifs, elle découvrit physiquement l’Orient qu’elle avait frôlé en illustrant Les Mille et Une Nuits. Kairouan et Gabès finirent de la séduire avec leurs « contours (qui) se noient dans la vibration chaude de l’atmosphère », comme elle l’écrit dans Le Monde colonial illustré (1925). La réédition du chef-d’œuvre de Flaubert enrichi de ses illustrations paraît une riche idée, et pour la redécouverte d’une artiste exceptionnelle (que les bibliophiles n’avaient cependant pas perdue de vue), et pour donner à nouveau l’envie de plonger dans les faubourgs de Carthage, du côté de Mégara.

Éric Dussert

Salammbô,
Gustave Flaubert
Illustré par Suzanne-Raphaële Lagneau.
Préface de Daniel Rondeau
Postface de Thierry Fraysse
Callidor, 416 pages, 39 

Un zaïmph tout neuf Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°237 , octobre 2022.
LMDA papier n°237
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