Sigila N°49 (Remèdes)
Sigila est une bien curieuse revue puisqu’elle est à la fois franco-portugaise et s’intéresse au secret dans tous ses états. Filon immense et revue pérenne puisqu’elle approche son cinquantième numéro. Les remèdes sont toujours des sujets d’actualité à une époque où la chloroquine a fait couler beaucoup d’encre à défaut de guérir. Ils renvoient à la rationalité de la médecine. Venant du latin remediare, ils impliquent l’amélioration d’un état. Toutefois, selon Guy Samama, ils seraient les produits « de l’imagination, de la croyance et de l’autosuggestion », renvoient autant à Molière qu’à Beckett entre rire et grimace.
Dans la préface, Delphine Bouit questionne : « Si la médecine ne peut résoudre le secret de l’inquiétude existentielle cela signifie-t-il que cette dernière soit véritablement sans remède ? » Au-delà des pratiques médicales, les modes thérapeutiques interrogent, certaines panacées comme « le sel de Sedlitz » ont eu leurs heures de gloire puis retombèrent dans l’oubli. Et le vaccin contre la peste ? Gilda Oswaldo Cruz nous rappelle comment un de ses ancêtres brésiliens eut tant de mal à l’imposer malgré son efficacité manifeste. Raison, magie, superstition, qui guérit ? Les livres ? Devrions-nous former des biblio-thérapeutes ? Jean Starobinski et Régine Detambel en sont partisans. Selon Frédéric Fiolof : « Non, le livre ne sauve pas. Mais s’il ne referme pas les blessures les plus vives, il sait parfois (…) y déposer la trace de la blessure des autres ». Laissons le mot de la fin à Pessoa : « La vie me dégoûte comme un remède inutile. Et c’est alors que je sens très clairement comme il me serait aisé de m’éloigner de cet ennui si j’avais seulement la force de vouloir vraiment m’en éloigner. »
Dominique Aussenac
Sigila N°49
226 pages, 17 €