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Domaine français Le sens de l’émerveillement

mars 2022 | Le Matricule des Anges n°231 | par Richard Blin

Par-delà ses convictions et ses enchantements, c’est la vie à vivre ici, maintenant, tout de suite qu’exalte Jean-Pierre Otte.

Présence au monde, plaisir d’exister

Buveur de vent et de vin, marcheur avide de savoir sensuel, Jean-Pierre Otte, qui se dit descendant d’une lignée de brume et de lune, a l’esprit joyeusement païen. Les jardins sont ses confidents, la botanique l’enchante et la lumière est pour lui un cristal respirant. Né dans les Ardennes belges, en 1949, il vit depuis longtemps sur un causse du Lot, entouré d’animaux. Sa vie, il n’aura cessé de l’inventer, en choisissant d’abord de faire des études en tant qu’auditeur libre, histoire d’assouvir sa passion pour des disciplines aussi variées que les sciences naturelles, la physique ou les mythologies du monde. En assumant ensuite de vivre de sa plume et de sa voix. C’est-à-dire de devenir écrivain – son premier livre, Le Cœur dans sa gousse, date de 1976 – mais aussi chroniqueur dans différents journaux, conférencier, conteur, à la radio comme sur scène, accompagné d’un contrebassiste. Également peintre, il expose depuis 1984 et pratique aujourd’hui une peinture à la cire d’abeille mêlée de pigments. Son œuvre littéraire couvre quelques grands domaines qui vont des fables de l’enfance aux essais en passant par Les Matins du monde – une série d’ouvrages s’intéressant aux mythes de la création et à l’origine de la femme – sans oublier les neuf livres qu’il a consacrés à l’observation des rites amoureux dans la nature, qu’il s’agisse de L’Amour en forêt, de L’Amour en eaux dormantes ou de La Sexualité d’un plateau de fruits de mer.
Dans son avant-dernier livre, Cette nuit est l’intérieur d’une bogue (Le Temps qu’il fait, 2019), il donnait à lire des textes écrits entre sa dix-neuvième et sa vingt-quatrième année, l’époque où il découvrait le travail de menuiserie qu’est l’artisanat d’écriture, les mots lui apparaissant comme « de petits outils émoussés, ébréchés, rognés et noircis, dont tant d’autres avant (lui) s’étaient servis. Il fallait les reprendre un à un, leur rendre un tranchant et un éclat ». Un temps d’apprentissage dont témoignaient, dans le même livre, trois ensembles de poèmes où, sans autre arme que le regard, il s’ouvrait à l’immédiat, nous menait sur le chemin des choses, portait une attention scrupuleuse au détail concret comme aux mouvements pulsionnels qui font sentir le corps. « Dans les sous-bois, où flottaient / ces odeurs de fourrure et de soufre / qui font soudain des fosses obscures / sous les muscles, nous nous tenions alors / en arrêt, immobile entre deux mouvements, / la patte levée au-dessus de / l’abîme blanc, comme pour écrire. »
Aujourd’hui, avec Présence au monde, plaisir d’exister, c’est une sorte de condensé de sa philosophie de vie qu’il nous distille. À partir d’un choix de chroniques publiées au fil du temps et distribuées en quatre sections – « Voyages dans la proximité »  ; « La tentation du Sud »  ; « Littératures »  ; « Réflexions faites » –, c’est un cantique de l’immanence qu’il nous propose, une invitation à vivre et à s’émerveiller. Capter le petit dieu de l’instant, atteindre le cœur même de ce qui, dans le réel, déclenche l’émotion, célébrer le renard, les oiseaux de nuit ou l’arbre, il s’agit chaque fois de plaisir et de présence. « Tout l’univers tient dans un éclat d’eau, un cri de grive ou une odeur de pivoine. » Mêlant le familier et le savant, le lyrisme candide et les fragrances de l’enfance, Jean-Pierre Otte défend une manière assez exaltante de se conjuguer au présent. Animé du désir ardent de « retrouver la danse de l’âme » et l’aventure de l’esprit en quête d’une loi d’harmonie par-delà nos désirs et nos désarrois, il sait s’introduire toujours davantage dans l’intimité de la vie comme dans celle de la création. D’où sa défense et illustration d’une littérature « qui soit tout le contraire d’une complaisance ombilicale », qui délivre du connu, du préconçu et du préjugé, insuffle l’idée et le désir de larguer les amarres pour jouir du présent et du miracle de se sentir respirer.
Cette disponibilité aux choses, cette aptitude à l’étonnement et cette capacité à tirer profit de tout ce qui nous arrive de faste comme de néfaste, il en développe le potentiel sous les espèces du signe et de la saveur. Et ce avec un souci constant de précision et de vérité, avec des mots justes – rares, précieux ou inusités quand il le faut – qui donnent de la couleur à son écriture, du corps et de la densité à son dire. Un livre donc qui initie à l’aventure de la vie et rayonne par instants de la nudité intrépide de l’aube.

Richard Blin

Présence au monde, plaisir d’exister
Jean-Pierre Otte
Le Temps qu’il fait, 272 pages, 25

Le sens de l’émerveillement Par Richard Blin
Le Matricule des Anges n°231 , mars 2022.
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