L'héritage Commune
- Présentation Tombeau d’un monde rêvé
- Autre papier Fouteurs de bordel, par Arno Bertina
- Autre papier La femme s’offre à la Commune, par Dominique Sigaud
- Entretien L’origine du chaos
- Autre papier Le premier mort de la Commune, par Pierre Vinclair
- Autre papier Un temps de repentis, par Michel Surya
- Autre papier Plaque de verre, par Nathalie Quintane
- Entretien Le rêve des reclus
C’est Prosper-Olivier Lissagaray qui l’écrit dans son Histoire de la Commune de 1871 rédigée peu après : les femmes « s’offrent à la Commune », se donnent. Si. Éternel cliché d’un récit masculin du monde ; la femme s’offre, la femme est offerte. L’homme, lui, fait ou instaure la Commune. D’ailleurs la Commune à son tour donnera peu aux femmes et sa postérité encore moins. Quand elle sera achevée dans le sang, les femmes en seront effacées à l’exception d’une ou deux figures. La femme ne participe pas à des luttes politiques en tant que sujet pensant, elle est dans un geste sublime de don de soi si féminin.
Même Bernard Noël le magnifique s’y met dans son Dictionnaire de la Commune, « Il y a eu une large adhésion des femmes de Paris à la Commune. Peut-être parce que beaucoup de femmes n’avaient rien à conserver ; peut-être parce que la révolution semblait ouvrir un temps où la pratique (c’est lui qui souligne) allait seule compter ». Ah. Soit c’est parce qu’elles n’avaient rien à perdre. Soit c’est à raison de leur fonctionnalité typiquement féminine dédiée à la pratique. Pas à raison d’un désir, d’une pensée. Récit masculin du monde.
La Commune, vive, soudaine, brûlante réactivation du Peuple contre les réactionnaires ne fait pas exception. Peuple est censé être un ensemble hétérosexuel. De fait les femmes du peuple et des intellectuelles bourgeoises en rupture de famille sont à la Commune, y créent ateliers, cantines, soins aux blessés, classes et cours du soir, articles de journaux, barricades. Mais pas le récit qui en sera fait. Pas les héros ni les hagiographies ni les lois qui suivront.
De la Commune il reste essentiellement une femme, l’institutrice Louise Michel, présidente du Comité de vigilance des citoyennes du 18e arrondissement. En 1886 elle écrit ses Mémoires, c’est beau « Les êtres, les races et, dans les races, ces deux parties de l’humanité : l’homme et la femme, qui devraient marcher la main dans la main et dont l’antagonisme durera tant que la plus forte commandera ou croira commander à l’autre, réduite aux ruses, à la domination occulte qui sont les armes des esclaves. Partout la lutte est engagée. Si l’égalité entre les deux sexes était reconnue, ce serait une fameuse brèche dans la bêtise humaine. En attendant, la femme est toujours, comme le disait le vieux Molière, le potage de l’homme ».
Avec elle André Léo romancière, journaliste et théoricienne, « C’est encore une nouveauté presque bizarre que de revendiquer la justice pour la femme » ; ensemble elles fondent la Société pour la revendication des droits de la femme pour une école primaire laïque des filles, et l’égalité d’accès au travail et l’égalité civique des femmes mariées. Avec elles Paule Minck, qui fonde l’organisation mutualiste féministe révolutionnaire, la Société fraternelle de l’ouvrière. Tant d’autres encore.
En vrai pourtant la Commune ne changera rien à la condition féminine. Elle sera pendant
3 ou 4 semaines,...