L'héritage Commune
- Présentation Tombeau d’un monde rêvé
- Autre papier Fouteurs de bordel, par Arno Bertina
- Autre papier La femme s’offre à la Commune, par Dominique Sigaud
- Entretien L’origine du chaos
- Autre papier Le premier mort de la Commune, par Pierre Vinclair
- Autre papier Un temps de repentis, par Michel Surya
- Autre papier Plaque de verre, par Nathalie Quintane
- Entretien Le rêve des reclus
On est le dernier jour avant le confinement, un vendredi d’avril. On est le dernier jour d’avant le confinement et c’est la dernière séance de poésie, le dernier poème, et j’aimerais bien faire d’une pierre deux coups, même si ce n’est pas au programme : en 3e, c’est le XXe siècle. En 4e, c’est le XIXe siècle – mais qui sait s’ils l’ont vue en 4e ? D’autant plus que l’an dernier, ça devant tomber pile poil au moment du premier confinement, ou bien ça n’est pas tombé du tout, comme toutes ces années où elle ne figurait pas même dans les manuels, ou alors sous la forme d’une photo illustrant les débuts de la photographie, calotype, daguerréotype, plaque de verre.
Calotype, daguerréotype, plaque de verre, je ne peux pas ne pas, au cas où, tenter de fixer un fond de mémoire de ce qu’elle fut, via un poème, puisque c’est au programme (poésie) même si ce n’est pas au programme (XIXe siècle), car bientôt tous partiront vers le lycée général talonnés par le bac, tout au long de l’année continue pressurés, ou bien vers le lycée technique, embryon d’Histoire puis rien, embryon de littérature puis rien, alors rien d’elle, ou bien en apprentissage avec un patron-patronne, et donc au taf au turbin, alors rien d’elle rien.
Cherchons l’astuce, calotype, daguerréotype, plaque de verre, tombe du web1 une anecdote en deux versions : première, de l’article « Penser », cet officier qui, du bout de sa botte, pousse les cervelles répandues à terre et dit « c’est avec cela qu’ils pensaient ». Comprendront-elles ? S’exclameront-ils ? Ah ! mais c’est répugnant, madame ! Verront-elles le mépris surpasser l’horreur, verront-ils l’horreur surpasser le mépris (j’hugolise, XIXe) ? Deuxième version, le poème, donc (du XXe siècle, c’est au programme) : pas de bandeau a dit le fusillé/je veux voir la mort arriver de face/et l’avenir soudain se raccourcir/le passé qui me tue n’est pas le mien/car sa vérité n’est pas mon affaire/mais le fusillé mord déjà la terre/le chef tueur donne le coup de grâce/le crâne éclaté répand le cerveau/le galonné pousse du pied ce reste/– Dire qu’il croyait penser avec ça !/fait-il avec un clin d’œil à sa troupe/sûr d’avoir vaincu la révolution/le peloton recharge ses fusils/et feu roulant sur la fournée suivante/tout ici est réglé par la justice/au nom bien sûr d’une légalité/toujours au seul service du pouvoir/tous les cadavres ont droit à la chaux vive/dès qu’empilés dans la fosse commune/la loi respecte ainsi la seule règle/tuer la vie pour qu’elle ne change pas.
L’une au-dessous de l’autre je les distribue, calotype, daguerréotype, plaque de verre ou photocopie plutôt. Lecture mais avant : deux minutes d’explication de ce que c’est, que ce fut : union libre (au programme), réduction de la journée de travail à 10 heures (presque au programme), réquisition des logements vacants et des entreprises abandonnées par leurs propriétaires (pas au programme), droit pour les personnes de nationalité étrangères de voter (toujours...