La littérature du Pacifique regorge d’atouts. Ceux qui ont lu les livres de Patricia Grace en savent quelque chose. En particulier s’ils ont lu sa nouvelle « Les papillons », un chef-d’œuvre absolu dans sa catégorie. Elle est issue d’Électrique cité, un recueil publié par Christian Robert, le directeur des éditions tahitiennes Au vent des îles, en 2006. La maison marque aujourd’hui son trentième anniversaire avec un enthousiasme renouvelé et un allant qu’on dirait fourni par Éole, en effet. À son catalogue, romans et essais, avec, c’est notable, une notable participation des femmes, qui sont, le sait-on, celles qui insufflent la vie à la civilisation des îles…
Christian Robert, vous fêtez le trentième anniversaire de votre maison, Au vent des îles. De votre point de vue insulaire, comment a évolué depuis cette date le monde du livre en Hexagone et dans les îles ?
Notre première préoccupation a été de diffuser les textes des auteurs océaniens dans le Pacifique – Polynésie française et Nouvelle-Calédonie. C’était aussi une évidence pour tous les auteurs qui ont rejoint notre catalogue. Le souhait par exemple de Patricia Grace, était d’être lue par les jeunes Océaniens. Et dans cette région, en trente ans, le monde du livre a beaucoup progressé. Nous partions, il faut le reconnaître, de très peu ! Quasiment pas d’écrivains locaux, pas de programme de traduction des anglophones de la zone, et des prix prohibitifs sur le livre importé de France. La création, il y a vingt ans, du salon « Lire en Polynésie », la professionnalisation des éditeurs et l’effet moteur d’Au vent des îles ont insufflé une dynamique dans le monde du livre local.
Les littératures d’Océanie, qui n’ont encore droit qu’à la portion congrue dans les librairies françaises, sont-elles également dans une phase florissante elles-mêmes ?
Nous sommes diffusés en France hexagonale depuis plus de vingt ans, mais les Beaux-livres de notre catalogue étaient les plus mis en avant, du fait des spécificités de nos distributeurs, Vilo, puis Daudin. Depuis janvier 2020, nous sommes diffusés par Harmonia Mundi livre. Nous sommes donc au début du process, un long travail reste à faire. Les littératures que nous défendons depuis longtemps ont toute leur place dans les librairies françaises, en ce qu’elles disent de cet immense espace qu’est l’Océanie, mais aussi ce qu’elles peuvent dire au monde. Des histoires de femmes et d’hommes, portées par des imaginaires non européens. À l’instar des autres littératures du monde, elles doivent être diffusées.
Votre catalogue est en effet riche de noms que le lectorat hexagonal découvre peu à peu…
Nous avons le privilège d’avoir publié une grande partie des pionniers de ces littératures, originaires de Polynésie française, comme Célestine Hitiura Vaite, Chantal Spitz ou Titaua Peu, de Nouvelle-Zélande comme Patricia Grace ou Witi Ihimaera, des Samoa, Albert Wendt, Sia Figiel, de Nouvelle-Calédonie,...
Éditeur Îles à lire
avril 2021 | Le Matricule des Anges n°222
| par
Éric Dussert
Installées à Tahiti depuis 1990, les éditions Au vent des îles se sont imposées comme le principal vecteur de transmission de la littérature du Pacifique en France. Un catalogue à découvrir.
Un éditeur