Imran, Solal, Maëlla, Amélie, Aaron, Swann, ce sont quelques-uns des enfants interrogés par Mohamed El Khatib avec lesquels il a coécrit cette Dispute, une pièce documentaire sensible autour de ce mystère que reste la séparation des parents. Quasiment tout le texte part du point de vue des enfants âgés de 8 ans car, selon l’auteur, « c’est à la fois un âge où demeurent une grande naïveté et une spontanéité dénuée de jugement moral, tout en étant un âge de conscience et d’hyperlucidité d’appréhension du monde ». La Dispute est un texte intime et touchant. Ce sujet grave devient tout de suite très concret, simple et direct. La multiplication des points de vue offre également un joli panel d’émotions. Le premier jeune, Swann, s’adresse au public par skype : ses parents n’ont pas réussi à se mettre d’accord. « Ma mère elle voulait que je fasse le spectacle, mais mon père, il ne voulait pas. (…) du coup, je peux jouer qu’une semaine sur deux, quand je suis chez maman. (…) Mais ça va, j’ai l’habitude, la seule fois que j’ai vu mes parents d’accord, c’était sur leur séparation. » Plein de questions sont évoquées, la difficulté de choisir où habiter, comment réagir face aux attentes des parents, les tensions qui peuvent persister, les avantages aussi de la séparation…
L’histoire de Maëlla qui habite à Aubusson, une ville coupée en deux par une rivière, est comme une métaphore de cette pièce. Le dimanche soir Maëlla doit traverser le pont toute seule, chacun de ses parents se trouvant d’un côté du pont. La petite fille nous raconte sa solitude lorsqu’elle arrive à la moitié du trajet, la difficulté de se séparer pendant le début de la traversée puis le plaisir de retrouver l’autre parent.
Le mot de la fin revient à Swann, toujours par skype. « Il y a un truc que j’ai toujours trouvé bizarre, c’est que, dans les contes, ça se finit jamais par : Ils se séparèrent et ils vécurent heureux et ils eurent beaucoup d’enfants quand même… Ou : ils vécurent heureux et ils eurent des enfants, mais avec plusieurs personnes. »
L. Cazaux
La Dispute, de Mohamed El Khatib
Les Solitaires intempestifs, 66 pages, 10 €
Théâtre La Dispute
janvier 2020 | Le Matricule des Anges n°209
| par
Laurence Cazaux
Un livre
Par
Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°209
, janvier 2020.