Colocataire de la librairie Quilombro dans le XIe arrondissement de Paris, L’Échappée fait depuis 2005 la part belle au militantisme dit de « critique sociale ». À un moment où tout concourt à la curiosité des citoyens en la matière… Depuis l’état d’urgence jusqu’à l’éclatant écho des prédictions énoncées en 1949 par Eric Arthur Blair, dit George Orwell. Travaillant à la fois la question des marges sociales et de ses « classes dangereuses », l’histoire des grandes causes et de la nature contemporaine du mal-vivre collectif (urbanisme, informatique, organisation sociale, etc.), des trentenaires prennent la mesure du monde et tentent d’apporter les livres qui feront remède, dans un mouvement de plus en plus solide d’initiatives variées destinées à amender une société qui mérite de l’être.
L’actualité sociale inspire-t-elle L’Échappée ?
Cédric Biagini : La question sociale bien entendu, mais l’actualité à proprement parler, non. Ce n’est pas notre temporalité. D’abord parce que nous estimons qu’un livre n’a pas pour fonction de coller aux événements récents. Même si c’est de plus en plus difficile de prendre du temps, d’avoir du recul, et de faire un pas de côté. L’accélération de nos sociétés incite à réagir dans l’instant, à faire disparaître tout temps mort, condition pourtant nécessaire à la réflexion. Le livre doit donc, plus que jamais, résister à cette frénésie communicationnelle. Surtout pour ceux qui se proposent, comme c’est le cas des éditions L’Échappée, de mener une critique radicale. Soit une critique qui ne reste pas à la surface des choses, qui ne cède pas aux modes, et qui ne se contente pas de réagir, comme tout le dispositif technologique (commentaires sur les sites, réseaux sociaux, etc.) nous y encourage. Cela n’empêche pas nos livres d’être en prise avec le monde actuel et ses évolutions récentes. Il est impossible de mener une critique conséquente en restant sur des visions trop datées du capitalisme industriel.
Vous avez varié les angles d’attaque…
Nous avons traité des formes contemporaines d’urbanisme dans Le Cauchemar pavillonnaire. Repli qui se nourrit d’un fantasme d’évasion abordé dans notre livre sur la déraison touristique : L’Usure du monde. Et cela dans un contexte de développement sans limite de la culture de masse, comme le montre Divertir pour dominer, l’une de nos meilleures ventes. Beaucoup de nos titres s’articulent pour constituer un catalogue cohérent et porteur de sens.
Les interrogations économiques, en particulier à propos de la décroissance, et technologiques paraissent cardinales.
Très clairement. Plusieurs de nos ouvrages racontent et analysent les résistances à l’industrialisation. Notamment La Révolte luddite, consacrée à nos glorieux ancêtres briseurs de machines, dans l’Angleterre du début du XIXe siècle. Héritage dont nous nous revendiquons aujourd’hui quand nous menons une critique sans concession de la société numérique. En cela, La...
Éditeur Pour une grande évasion
juillet 2016 | Le Matricule des Anges n°175
| par
Éric Dussert
Dans un pays en « état d’urgence », de jeunes éditeurs interrogent les possibilités de vivre ensemble. Critiques mais positifs.
Un éditeur