Une fois de plus, la Chine ouvre les pages sombres de son histoire. Pas par la voix officielle, bien sûr, mais par celle de ses dissidents, de ces écrivains qui ont pu témoigner en faisant sortir leurs manuscrits du pays, ou en s’exilant, comme Diane Wei Liang. Née en 1966, au début de la Révolution culturelle, elle doit quitter la Chine en 1989, suite aux révoltes étudiantes de la place Tiananmen de Pékin. Elle a la chance de partir étudier aux États-Unis où elle est pourvue d’une bourse. C’est cet itinéraire à travers l’histoire chinoise qu’elle raconte dans ce roman autobiographique. Fille d’intellectuels, elle est harcelée par les écoliers et les délinquants qui la traitent de « vilaine princesse capitaliste », bien qu’avec tout son enthousiasme enfantin elle aille ramasser des choux glacés pour toute nourriture collective. Après la mort de Mao, en 1976, elle put intégrer « une école privée d’élite », puis entra en 1986 en deuxième année de psychologie. C’est là qu’elle rencontre l’amour… Très vite, ils s’identifient aux amants d’Anna Karénine, car il faudrait à Dong Yi divorcer, dans une Chine réfractaire à cette insulte à l’honneur. Ils se retrouveront dans la tourmente des 50 000 manifestants de Tiananmen, face aux « tyrans », jusqu’à ce que « le sang coule du ciel », jusqu’à ce que « 1 000 contre-révolutionnaires » soient arrêtés et que leurs familles remboursent « le prix de la munition pour pouvoir emmener le corps ». Il ne s’agit peut-être pas là d’un roman inoubliable, mais cela reste un témoignage crucial et prenant sur les mentalités politiques d’une Chine qui n’est pas encore un continent de libertés.
Les Amants de Tiananmen de Diane Wei Liang
Traduit de l’anglais par Elise Argaud, Éditions de l’Aube, 368 pages, 23 €
Domaine étranger Tiananmen mon amour
juin 2006 | Le Matricule des Anges n°74
| par
Thierry Guinhut
Un livre
Tiananmen mon amour
Par
Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°74
, juin 2006.