Marcel Schwob, l’homme au masque d’or
Depuis 2002 et la publication par Sylvain Goudemare et Alexandre Gefen des deux concurrents volumes d’Œuvres incomplètes (Belles Lettres et Phébus), on assiste à la résurgence de Marcel Schwob (1867-1905), cet écrivain, lecteur érudit, qui fut une bénédiction pour la littérature. Il était temps.
La consécration définitive, c’est une exposition de la Bibliothèque municipale de Nantes, le berceau de sa famille, et son catalogue. Fignolé par des spécialistes (Bernard Gauthier, Evanghelia Stead, François Leperlier, etc.), il met en évidence les différentes facettes du personnage, dont les principales furent ses passions pour l’argot, pour Stevenson – sur les traces duquel il s’embarqua, jusqu’à Samoa, en octobre 1901 – et pour les histoires merveilleuses.
Auréolé de mystère, comme ses livres, on perçoit toute sa grâce en observant les pages manuscrites, les illustrations magnifiques (Fernand Siméon), les coupures de presse et les photos qui nous sont offertes, jusqu’à son « grand collier de kabbaliste » récupéré lors de la vente André Breton. Et, dans une lettre de 1888 citée par Patrick Mauriès, on comprend tout à coup : « Ma mémoire est rapiécée de bouts et de morceaux », déclarait-il. C’est bien le symptôme d’une gourmandise de l’esprit aux curiosités sans frein, toujours en quête d’un nouveau plaisir. C’est aussi le gage des bonnes surprises que l’on fait, nous lecteurs, au détour d’une page. De mémoire d’homme, nul n’est ressorti de cette œuvre, forêt formidable. Alors, désormais, les retardataires n’ont plus d’excuse. Et si l’on s’occupait un peu de Gourmont maintenant ?
Éric Dussert
Marcel Schwob, l’Homme au masque d’or
Collectif - Bibliothèque municipale de Nantes/Le Promeneur, 206 pages, 39 €