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Domaine étranger Non, rien n’a changé

juin 2002 | Le Matricule des Anges n°39 | par Pierre Hild

Première traduction de Michael Bracewell, un romancier anglo-saxon que l’on a pris pour « un anthropologue urbain ». Un texte vif, lucide, drolatique et déphasé.

Une époque formidable

On connaissait les éditions du Dilettante comme de fins dénicheurs d’auteurs passés mésestimés ou de nouvelles voix françaises. Rompant avec cela, elles nous livrent aujourd’hui le premier texte traduit d’un auteur anglo-saxon inconnu dans l’Hexagone : un texte enthousiasmant, servi par l’admirable traduction de Robert Davreu, qui a peut-être attiré ses éditeurs, aussi, pour des raisons qu’évoqua la journaliste Nicola McAllister dans les colonnes du Spectator : « Perfect Tense a davantage en commun avec la fiction française contemporaine qu’avec ses propres équivalents britanniques : elle est adulte, humaine, philosophique » ( Si l’on peut dire, n’est-ce pas, et quoi que cela veuille recouvrir concrètement).
Né en 1958 dans la banlieue de Londres, Michael Bracewell développe outre-Manche, depuis vingt-cinq ans, une oeuvre saluée tant par la presse que par ses pairs David Lodge, Jonathan Coe ou Stephen Fry. À travers sa biographie, certains passages d’Une époque formidable, on ne peut oublier qu’il n’avait pas vingt ans quand explosa la vague punk anglaise, guère plus quand le no future vint s’exploser sur le mur étouffant de la grande période glaciaire des années quatre-vingt.
Faux-frère, le héros d’Une époque formidable ouvre l’étrange bal de ce roman au moment où il est victime d’une hésitation matinale que d’autres appelleraient crise intérieure. « Et donc je n’étais ni pour ni contre les autres employés de bureau qui me regardaient en coin, alors que j’hésitais par ce matin d’été sur London Bridge. J’étais simplement déphasé. Ce n’était rien moins que cela qui m’apparaissait tandis que je me joignais au reste des banlieusards qui se hâtaient, flânaient ou se pavanaient sur le pont ». Le cadre, ce qui le fait trembler, est contenu ici. La City londonienne, son quartier d’affaires, l’espace concentré des flux et reflux capitalistiques et de leurs ouailles, le « déphasé » d’une des fourmis laborieuses de ce monde, mal intégré, pas encore laminé, qui se voudrait encore doué d’une individualité. « Lorsque je regarde mes quatre assistants, pour lesquels j’aimerais éprouver de la sympathie, je les vois comme les représentants d’une génération plutôt que comme des individus. Ils ont l’air d’exister comme un dépotoir à clichés ; ils vivent dans une culture de superlatifs, entièrement fondée sur le prélèvement des éléments les plus exagérés de tout. »
À l’encontre de cela, même s’il reprend un thème déjà traité -les souffrances d’un jeune Werther du tertiaire-, la finesse de l’écriture de Bracewell joue des clichés pour dilater un monde programmé. Entre le sentimental journey et le voyage au bout de la nuit, d’une langue policée mais personnelle, Bracewell dresse le portrait d’un antihéros qui cherche le vouloir-vivre, sa volonté propre dans le monde du tout à volonté : « Cet après-midi, tandis que je m’enfonçais dans la fraîcheur de l’air conditionné du gigantesque rayon d’alimentation de Marks & Spencer, au coin d’Orchard Street, W I, je pris conscience que mon sentiment d’avoir personnellement atteint la masse critique de mon expérience se trouvait reflété par cette idée plus vaste qu’il y a désormais tout à volonté : les sandwiches, la technologie, les vacances, les chaussures, les voitures, les disques, les chaînes de télé, les restaurants, tout ce que vous pouvez imaginer. »
Comme le souligne son traducteur, Bracewell développe « une manière poétique, imaginative, d’être-au-monde, qui le retient de verser dans le discours catégorial au profit d’une parole singulière et pensante ». Une manière, aussi, de se rappeler que « les choix sont une bénédiction dans un monde où le choix est si souvent nié -et j’ai le choix. » Un livre de premier choix.

Une époque formidable
Michael Bracewell
Traduit de l’anglais par Robert Davreu
Le Dilettante, 224 pages, 17 euros

Non, rien n’a changé Par Pierre Hild
Le Matricule des Anges n°39 , juin 2002.
LMDA PDF n°39
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