En Afrique, un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle, en Israël, du moins dans l’imaginaire d’Orly Castel-Bloom un vieillard qui n’en finit pas de vivre se transforme en prédateur de supports de fictions. Mina, mère au foyer irréprochable, consciente de son asservissement, arrive à sublimer sa condition, jusqu’au jour où Oved son affairiste de mari ramène sa grand-mère Flora à la maison. Cette dernière ne boulotte que le papier et de préférence les scénarii que Mina avait concoctés étant jeune et célibataire. Ces derniers s’épuisent, le mauvais œil se focalise sur le foyer. Pour conjurer le sort, Mina est entraînée par l’aïeule dans un périple à travers le temps, voyage picaresque dans lequel elle découvre que Flora n’a pas cent ans, mais est née au XVIIIe siècle en Crète. Ce « fragment d’utopie » autoritaire, désagréable, mènera une enquête afin de retrouver l’assassin de son amant, commissaire de la police des Années et Mina sera son esclave pisse-copie. Dans la tradition des contes et légendes judaïques, avec un clin d’œil au réalisme magique sud-américain de Gabriel Garcia Marquez, Mina Lisa contient d’intéressants ferments de réflexion sur l’imaginaire, la création, la fiction comme élixir d’éternité et onguent du réel énoncés avec un humour pince-sans rire au féminin yiddish.
Hélas cette réflexion s’enlise dans les méandres du voyage spatio-temporel. Après l’excellente introduction, les deux dernières parties se révèlant fort longues, trop alambiquées, pas assez structurées. Orly Castel-Bloom est née en 1960, à Tel-Aviv. Après des études de cinéma, elle se consacre à l’écriture. Certains de ses ouvrages sont traduits en plusieurs langues.
La Mina Lisa
Orly Castel-Bloom
Traduit de l’hébreu
par Rosie Pinhas-Delpuech
Actes Sud
239 pages, 128 FF
Domaine français Fromage ou fiction ?
septembre 1998 | Le Matricule des Anges n°24
| par
Dominique Aussenac
Un livre
Fromage ou fiction ?
Par
Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°24
, septembre 1998.