Pauline, la cinquantaine, a quitté son mari après avoir été trompée. Correctrice dans l’édition, elle passe ses étés dans une maison perdue au nord de l’Angleterre baptisée le Bout-du-Monde. Un été, sa fille accompagnée de son mari et de leur fils vient là passer quelques jours. Un séjour en famille qui devient un huis clos où les affrontements sont des escarmouches que l’on essaie d’oublier, où les silences sont plus importants que les paroles. La vérité qui apparaît au fil du récit est celle du cocuage. La fille de Pauline est heureuse mais elle est trompée par son mari. Pauline, question d’expérience, s’en aperçoit bien avant sa fille. L’histoire se répète et l’Anglaise Penelope Lively construit son récit à la façon d’une démonstration dont la conclusion certaine est l’impossibilité du couple. L’écriture est classique, le sujet vire au mélodrame. L’auteur, détentrice du Booker Prize, évite les écueils du genre. Plutôt qu’un best-seller déchirant, elle a écrit un roman dont la principale qualité est la justesse du rapport mère/fille et surtout la bonne distance trouvée entre elles. Leur relation n’est pas une suite de longues explications cathartiques mais une série de dialogues. L’une, âgée, regarde l’autre s’enliser sans savoir que faire. Et chacune est le miroir de l’autre.
Ceux qui n’aiment pas les récits psychologiques dans lesquels le style se fait discret ne trouveront pas en Penelope Lively un auteur de chevet. Les digressions sur la campagne et les théories historiques du brillant gendre sont parfois longues. Mais il reste une petite voix que l’on écoute malgré tout, un petit souffle de malheur dans le mélodrame prévisible qui rend ce récit attachant. Il faut se méfier de l’expression fourre-tout de non-dit. Généralement, elle habille la faiblesse d’un texte mais ici, c’est précisément la construction et l’écriture elliptique du non-dit entre mère et fille qui fait la force du roman.
Un été au Bout-du-Monde
Penelope Lively
Traduit de l’anglais
par Anne-Cécile Padoux
Denoël
266 pages, 135 FF
Domaine étranger De mère à fille
janvier 1998 | Le Matricule des Anges n°22
| par
Christophe Dabitch
Un livre
De mère à fille
Par
Christophe Dabitch
Le Matricule des Anges n°22
, janvier 1998.