éditions POL
A propos
P.O.L. : la petite fabrique de littérature
En onze ans, P.O.L. est devenu un laboratoire incontournable pour le renouvellement des Lettres. Sans pour autant revendiquer un quelconque label. Chez P.O.L., la curiosité et le risque semblent être des investissements productifs.
Ma vision de l’édition s’est ouverte et en même temps précisée. Je sais maintenant que la frontière ne se situe pas entre les livres difficiles et ceux qui s’adressent au plus grand nombre, mais entre les bons et les mauvais livres. » Ces propos de Paul Otchakovsky-Laurens, publiés en novembre 1982 par Livres hebdo, le directeur des éditions P.O.L. est prêt à les signer aujourd’hui encore. Car ils ne forment pas une boutade : pour preuve, la concomitance sous la couverture blanche d’auteurs comme René Belletto, Danielle Sallenave, Hubert Lucot ou Olivier Cadiot. Pour preuve encore, le...
Une écoute attentive
En 11 ans, P.O.L. a publié une vingtaine d’ouvrages dont les manuscrits sont arrivés par La Poste. Aujourd’hui ce sont près de deux mille envois par an qui arrivent 8, Villa d’Alésia dans le 14e. Chaque manuscrit est, dès réception, répertorié sur le réseau informatique de la maison. Grâce à un logiciel efficace, le nom et l’adresse de l’envoyeur, le genre de l’ouvrage (de roman à projet...
Ouvrages chroniqués
Salopes
de
Dennis Cooper
2007
Lmda N°85
Les pratiques SM décrites ici n’ont rien de burlesque. Dennis Cooper explore ce qui en nous unit la violence et le plaisir, l’effrayante puissance du fantasme.
À chaque époque, sa métamorphose du roman : le XVIIIe siècle, pour tenter de rendre la passion de la conversation qui animait alors ses élites à la fois sociales et intellectuelles, se plut au roman épistolaire : la multiplicité des correspondants, les différents registres et le système d’échos entre les lettres mimaient la vie des salons et l’entrechoc des personnalités. Dennis Cooper...
Dans la toile
juillet 2007
Salut les anciens / Salut les modernes
de
Christian Prigent
2000
Lmda N°34
D’un côté, Salut les anciens propose une dizaine de lectures autour de Marot, Mallarmé, Balzac, etc. ; de l’autre, en retournant l’ouvrage Salut les modernes s’attache à décrypter la production de contemporains proches de l’auteur. De ces deux livres en un, disons tout de suite que le plus excitant, le plus jouissif n’est pas celui qu’on pense. C’est du côté des anciens, en effet, que la...
Ca merdre drôlement
avril 2001
Sangs
de
Mika Biermann
2017
Lmda N°182
L’imaginaire cinématographique américain est l’occasion pour Mika Biermann de construire un bref roman choral En machine infernale.
La famille est un cauchemar permanent dont on peut rire (souvent jaune), surtout si elle est américaine. Un véritable nid à traumas qu’on se refile de père en fils. L’occasion de la faire tourner en bourrique est alors trop belle, encore faut-il que le mouvement giratoire possède une certaine élégance et ne trébuche pas sur les clichés. Les sagas familiales, d’autre part (et ce livre, à sa...
Une histoire de famille
avril 2017
Sans lasso et sans flash
de
Dominique Fourcade
2005
Lmda N°65
Les trois nouveaux livres de Dominique Fourcade, véritable triptyque flottant, sont des exposés fluorescents de notre époque, trois coupes dans notre temps où, nécessairement, l’abject côtoie le sublime.
On peut comparer l’œuvre de Dominique Fourcade à celle d’André du Bouchet ou de Jacques Dupin, pour la génération antérieure. Elle en a la liberté, l’ampleur et la force de déplacement. Rien ne restreint l’écriture chez Fourcade, sinon sa capacité à se ployer dans la vérité sensible et crue du monde. « Chevilles/ dont le talc est brisé. » (En laisse) Mais il y faut l’art de la composition...
Trois coups sous les arbres
juillet 2005
Saufs riverains (trilogie des rives, 2)
de
Emmanuelle Pagano
2017
Lmda N°181
Qui n’a pas rêvé devant un lac artificiel à la vie que l’eau a noyée ? Emmanuelle Pagano se penche depuis les rives du Salagou sur l’histoire familiale et celle de toute une vallée.
Entamé il y a deux ans avec Ligne & fils, le triptyque de la trilogie des rives d’Emmanuelle Pagano ouvre son deuxième volet avec l’ambitieux Saufs riverains. Nous ne sommes plus le long de la Ligne et de ses moulinages mais plus au sud, au cœur d’une garrigue qui sera un jour noyée sous un lac artificiel, le Salagou. Terres familiales du côté paternel où la vigne et le lait des brebis...
Un monde enfoui
mars 2017
Selva !
de
Frédéric Léal
Lmda N°41
S’inspirant de rites protocolaires de la Légion étrangère, Frédéric Léal signe un texte à tiroirs tumultueux et drôle. Où la phrase, fragmentée, détournée, "est l’animatrice en chef du récit".
Présenté comme un premier roman de la rentrée littéraire, Selva ! a quelque chose du vilain petit canard au milieu d’une portée très ordinaire. La différence fondamentale entre Selva ! et un roman contemporain tient dans sa dynamique d’écriture. Entre la première page du livre et la dernière, nulle baisse de régime. On est propulsé illico presto à Kourou, dans la Légion étrangère. De Kourou,...
L’esprit de corps
novembre 2002
Sentimentale journée
de
Pierre Alferi
Lmda N°21
Chaque livre de poèmes de Pierre Alferi chantourne la forme particulière d’un dire. Sentimentale Journée, lui, mélange les pistes et les ornières, perdant les faits sans effets…
L’inversion tout anglo-saxonne qui compose le titre du nouveau livre de Pierre Alferi fait d’abord penser à un film, à un road-movie dans l’Amérique des années 70, néons, flashs et L.S.D. En enlevant, toutefois, les effets repérables d’une sorte d’Easy rider, la construction de Sentimentale journée, par ses vers longs, qui s’enchâssent les uns à la suite des autres par des rejets arbitraires,...
Elégie des surfaces molles
novembre 1997
Série noire
de
Bertrand Schefer
2018
Lmda N°196
Bertrand Schefer signe la reconstitution palpitante d’un kidnapping retentissant. Une façon de réfléchir aux rapports entre fiction et réalité.
Au dos du livre, pas un mot sur l’auteur (Bertrand Schefer, 46 ans, quatre romans au compteur, celui-ci compris, depuis 2012 : Cérémonie, La Photo au-dessus du lit, Martin), aucun résumé. Seulement cette phrase : « Pour une fois, c’est le roman qui inspire le fait divers. » En quelques mots, tout est dit. Schefer revient en effet ici sur « l’affaire la plus retentissante de la décennie » :...
Histoires d’un rapt
septembre 2018
Le Soleil est battu
de
Rochelle Fack
2020
Lmda N°219
Rochelle Fack nous dépeint le portrait méandreux d’une femme envahie de manies, dont le métier est d’alléger les fins de vie, et qui s’avance peu à peu sur le chemin de la lumière.
La douleur m’occupe. Sa façon de déborder. De travestir les malades, de les faire déparler. » Cette phrase pourrait être une introduction à l’œuvre de Rochelle Fack, qui donne la parole à des héroïnes invariablement bancales affichant, en marge d’une société relativement saine et policée, leurs blessures, leurs forces de caractère et leurs réticences. Ses cinq romans, tous publiés chez P.O.L,...
L’étoffe d’une libération
janvier 2021
Spécimen mâle
de
Iegor Gran
Lmda N°36
Le troisième roman de Iegor Gran repose sur une idée : qu’adviendrait-il si les femmes, d’un seul coup, disparaissaient de la planète ? Écrit sur le mode de la fantaisie sans imagination et de l’ironie sans drôlerie, le roman devrait provoquer la soudaine disparition de ses lecteurs avant son mitan. Que l’idée de départ ne génère aucune pensée est déjà un exploit. Pour Iegor Gran, la...
Spécimen mâle
septembre 2001
La Splendeur dans l’herbe
de
Patrick Lapeyre
2016
Lmda N°171
Le nouveau roman de Patrick Lapeyre ne retrouve pas la splendeur fraîche de ses premiers livres. Le vide a inoculé la langue. Soporifique.
D’un côté, nous avons donc Homer : un physique à la Jacques Tati qui pourrait le rendre cocasse et attachant, une fantaisie de comptable (ce qu’il est), mesuré en tout et imprévisible en rien. Homer vient voir Sybil, femme entre deux âges, qui aux beaux jours est « souvent dans le jardin, en train de lire ou de biner ses massifs de fleurs » et qui ressemble à une Emma Bovary que le romantisme...
Les heures creuses
mars 2016
Suivant l’azur
de
Nathalie Léger
2020
Lmda N°218
Mettre en mots ce qu’il reste après l’irrémédiable ? Penser l’impensable ? Expérience de la limite avec le journal de deuil de Nathalie Léger.
Cette fois, la femme blessée, c’est elle. Trouée : « c’est le sens du mot “veuf”, “veuve”, le vidé, la vidée ». Après la comtesse de Castiglione dont elle retraçait le narcissisme délétère dans L’Exposition, après le portrait défait de celle qui incarna superbement Wanda dans Supplément à la vie de Barbara Loden ou celui, tragique, de la performeuse Pippa Bacca dans La Robe blanche, cette...
Larmes d’encre
novembre 2020
Sur le Motif
de
Hubert Lucot
Lmda N°12
Un texte fragmentaire qui fouille l’espace familier de Paris pour découvrir la fragilité du motif : Hubert Lucot au pays du Réel.
Sur le Motif est un livre rebelle, situé à la frontière des genres : Hubert Lucot nous donne en effet à découvrir des pages de journal, des bribes de carnets de voyages, des notes nées de la rue, qui cherchent « à détecter les signes (…) du changement », ou réfuter l’évidence du réel « en frôlant les murs »…
A l’instar de Guillaume Apollinaire et de Léon-Paul Fargue -avec respectivement Le...
Observations trouées
juin 1995
Le Syndrome de Gramsci
de
Bernard Noël
1994
Lmda N°8
Le Syndrome de Gramsci
Imaginez quelque chose d’horrible et d’imprévisible, imaginez une chose pire qu’imprévisible, une chose insensée, par exemple qu’un chemin très connu s’interrompt tout à coup sous vos pas, ou qu’un abîme s’ouvre dans le parquet de votre chambre, ou pire encore que vous n’arrivez pas, alors qu’on vous menace, à vous rappeler les gestes de la marche si bien que vous...
Le Syndrome de Gramsci
avril 1994
Le Syndrome de Gramsci
de
Bernard Noël
1994
Lmda N°8
Le Syndrome de Gramsci et La Castration mentale évoquent un apocalypse culturel à venir. Le premier sur le mode de la fiction, le second sur celui de l’essai. Deux livres de l’éveil.
Le Syndrome de Gramsci pourrait être une longue lettre écrite à une femme. C’est ainsi en tout cas que se présente le roman qui n’a de roman que le nom. Le narrateur s’adresse à un vous derrière lequel se cache une amante. Sa missive revêt un caractère obsessionnel. Notre narrateur, lors d’une discussion avec un ami en Italie, a eu tout à coup un trou de mémoire à propos d’un nom propre,...
L’affolement de la perte
avril 1994
Syngué sabour : Pierre de patience
de
Atiq Rahimi
2008
Lmda N°96
En Afghanistan, à l’intérieur d’une maison que la guerre a vidée, au sein d’une ville proche mais silencieuse, seulement zébrée par les déflagrations des bombardements, une femme veille son mari taliban. Désormais grabataire, il n’est plus qu’un cadavre à peine vivant, un « corps vide » où « sous la peau diaphane, ses veines comme des vers essoufflés s’entrelacent avec les os saillants de la...
Syngue sabour
septembre 2008