Roman tendu d’espoir, Partiellement nuageux fête les retrouvailles avec l’écriture d’Antoine Choplin. Ici, et comme toujours chez l’auteur de Radeau, de La Nuit tombée, ou de Quelques jours dans la vie de Tomas Kusar, l’intrigue propulse tout en douceur le lecteur dans un autre espace-temps, un ailleurs sentimental, un clair-obscur où l’Histoire posée en filigrane flirte avec l’universel, où les destinées d’anonymes sont enfin réhabilitées. Dans un coin du Chili, oublié de la modernité mais pas des ravages de la dictature, vit, seul, Ernesto, astronome. Il étudie les nuages de Magellan, une minuscule galaxie. Il scrute le ciel, dessine à ses heures d’étranges oiseaux. Parfois, il prête main-forte à ses voisins, des Mapuches, aussi avares de paroles que lui mais habités par un grand projet de réconciliation, face à l’océan construire un jardin de totems dédiés aux morts. Souvent, Ernesto converse avec ses compagnons, ceux qui partagent son logis, un matou indocile et son télescope en bout de course qu’il nomme Walter. En sourdine, il y a, omniprésent, le souvenir de Paula, sa fiancée disparue sous Pinochet. Ernesto a dompté le temps, l’ordinaire des jours. Il s’est construit une barricade de solitude, une paix fragile, hantée par l’impossible deuil. Antoine Choplin, avec son habituelle délicatesse, va surprendre son personnage, l’obliger à sortir de sa carapace, lui faire entrevoir un autre amour. Il lui présente Ema, une jeune femme qui doit non seulement conjurer les blessures du passé mais aussi exorciser celles du présent, affronter le père, essayer de pacifier l’impossible.
Si Antoine Choplin donne vie aux fantômes, c’est pour leur offrir le repos. Il déroule une narration à la fois pleine et aérienne, celle qui suit pas à pas la renaissance d’Ema et d’Ernesto, personnages aussi fragiles qu’indestructibles. Partiellement nuageux… un roman d’amour totalement radieux.
Martine Laval
Partiellement nuageux
Antoine Choplin
La Fosse aux ours, 144 pages, 16 €
Domaine français Partiellement nuageux
janvier 2019 | Le Matricule des Anges n°199
| par
Martine Laval
Un livre
Par
Martine Laval
Le Matricule des Anges n°199
, janvier 2019.