CCP N°30 (Tarkos)
Faisant suite à la parution de L’Enregistré, qui réunit performances, improvisations et lectures de Christophe Tarkos (P.O.L, 2014), la revue marseillaise CCP consacre au poète son dossier d’automne, cordonné par Jérôme Mauche. Stéphane Bérard, qui fut de l’aventure Tarkos, écrit que « monsieur Ponsart me fait les gros surcils en me rappelant que je dois me souvenir de cette présence de « Christophe Tarkos aux Inédits » » du cipM, en 1993 : « Maintenant ces pa-ges pour linceul, / enveloppent doucement les pensées qui font ton corps, / de verve continue dans l’ouate des futurs, assez définie / quand même, il fallait pousser Mémé dans les orties. / Ce fut assez bien effectué, gare toutefois à la / chansonnette ». Dans l’ensemble, l’axe est politique, saillant, on y rit jaune. Car Tarkos est à la poésie ce que les Sleaford Mods sont au post-punk, assénant de longs monologues bégayés sur la brutalité des rapports de classe. Thomas Clerc, partant de la réalité du mythe Tarkos, rappelle qu’il « est indissociable de cet effort gigantesque pour déconnoter la poésie, pour la démettre du piédestal où l’avaient placée tout ceux que ça arrangeaient, notamment les gens de lettres… ». De Dada à Fluxus, en passant par un certain nombre d’héritages des avant-gardes (de l’Ursonate de Schwitters à G. Luca, F. Dufrêne ou B. Heidsieck, et tout l’art de l’idiotie), C. Tarkos fait son chemin et tisse sa bobine à lui, mi-bouffonne mi-dramatique (cf. le très grinçant « Le Bonhomme de merde »), moulinant sa pâte-mot avec un alliage fait de vitesse et de lenteur qui en fait un truc qui dévie, va, ouvre, et file entre les doigts. Cette énergie rageuse (oralisée, écrite) est impressionnante. C’est ce que ce Cahier aborde.
E. L.
CCP N°30, 96 pages, 12 €, cipM