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Poésie L’homme est lumière

septembre 2007 | Le Matricule des Anges n°86 | par Lucie Clair

Réédition en français d’un des grands poètes portugais du XXe siècle, entre ombre et clarté, dans une communion désespérée avec l’humain.

Un couteau entre les dents

Illustration(s) de Aldina
Editions Ab Irato

Il est des écrits de larme et de sang nés d’un cœur tordu comme un linge que l’on essore, des poèmes qui ont oublié d’être ciselés, de se rendre présentables, arrivent froissés par les poings fermés on les rencontre parfois sans les chercher au détour d’une nuit blanche, celle qu’emprunte leur regard halluciné, qui sait lire, sur le monde superposé, la vision de notre condition. Ces poèmes se promènent Un couteau entre les dents, telle l’image du bolchevik de la propagande, et ça leur plaît. Non pas tant d’être affiliés par leur auteur à quelque parti politique obédience de circonstance et référence caustique, mais de nous parler de ces peurs cachées, de nous dire sans frémir : « Le plus beau spectacle d’horreur, c’est nous./ Ce visage avec lequel nous aimons, avec lequel nous mourrons n’est pas le nôtre ; ni ces cicatrices au matin toujours fraîches, ni ces paroles qui vieillissent dans le court espace d’un jour. (…) Nous cherchons l’issue la vraie, la seule et nous nous cognons la tête contre les murs. A ce jeu, il y a ceux qui gagnent la colère, et ceux qui perdent l’amour. » António José Forte a gagné les deux quand bien même sa vie fut soumise à une perpétuelle tension, une douleur emportée contre les obstacles à l’idéal d’une humanité pacifiée, en harmonie. Il a gagné tardivement, à grand-peine, dans le silence qui l’empoignait, et qui servait parfois aussi de « pacte des réalités/ de ces hautes/ figures de pierre/ alerte de l’ultime entendement/ lieu vers lequel on porte/ le meilleur et le plus généreux. » Il a gagné, car ce pacte irascible qu’il a scellé ouvre, bien après sa mort en 1988, des pages d’amour à ses lecteurs.
Né en 1937 à Povao de Santa Iria, lointaine banlieue de Lisbonne nichée au creux de l’embouchure du Tage, il a grandi sous les années Salazar, et rejoint à la fin des années 50 le groupe surréaliste déjà à l’état fantomatique dit « O grupo do café Gelo » dans la capitale. Ancien lieu de rendez-vous des anarchistes, le café rassemble ceux qui cherchent un espace dans cette ambiance « bas de plafond », sans alternative politique à la censure. Le surréalisme au Portugal a connu des débuts tardifs (1947) et, comme ailleurs, une histoire mouvementée, faite d’exclusions, de dissolutions, refondations et de relations ambivalentes avec le Parti communiste. António José Forte a été en quête de rupture avec la ligne du parti, et si le Gelo y a contribué, c’est surtout à partir de sa lecture d’Henri Lefebvre, puis à Bruxelles en 1966 des écrits de l’Internationale situationniste que s’enclenche la dynamique qui le conduira à fonder la revue Potlach à Paris l’année suivante, puis, de retour au Portugal, à initier une synthèse originale de ces deux courants. « La gueule entre deux très grands yeux/ derrière des larmes plus grandes encore/ voici entre tous ton meilleur portrait/ celui d’un jeune chien auquel ne manque que la parole » se décrit-il lui-même dans un poème intitulé « Portait de l’artiste en jeune chien » fidèle envers et contre tout, à sa sensibilité, à sa lucidité et la colère hurlante qu’elle déclenche parfois en lui, à la limpidité de l’humain qu’il voit battre en son cœur et ne parvient pas à atteindre chez ses semblables. Non pas qu’il ait été misanthrope ou farouche, António José Forte était souvent entouré d’amis, et même l’expérience violente et miséreuse de l’exil ne fut pas solitaire. Mais par cette impossibilité aux accents de Desnos d’être tour à tour « comme un tournesol (…) comme un iceberg » renvoyé à sa dualité.
Un couteau entre les dents en une traduction inédite en français agrémenté des dessins de sa compagne, nous livre, outre le poème éponyme, ses 40 nuits d’insomnie de feu de dents dans une implacable girandole, Entrevue, Désobéissance civile, et l’essai Comment communiquer ? hommage à Dada, Jarry, Andersen et au poète Antonio Maria Lisboa, mort en 1953, « parce que l’amour, et la liberté ne sont pas de la petite monnaie roulant sur les comptoirs des grands magasins de la littérature. »

Un couteau
entre les dents

AntÓnio José Forte
Traduction inédite du portugais
et présentations d’Alfredo Fernandes et Guy Girard.
Dessins d’Aldina.
Collection bilingue
Ab Irato
239 pages, 16

L’homme est lumière Par Lucie Clair
Le Matricule des Anges n°86 , septembre 2007.
LMDA papier n°86
6,50 
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