La Rosée son histoire et son rôle
Si l’une des vertus de la lecture est d’aider au déchiffrement des signes du monde, le mémoire que consacra Jules Jamin (1818-1886) à l’histoire et au rôle de La Rosée (1879) y contribue avec élégance et efficacité. C’est que la rosée resta jusqu’au début du XIXe siècle une énigme pour la physique. Fille de la nuit, sueur du ciel, salive des astres (Pline), bénédiction céleste ou encore perle alchimique, ce presque rien resta longtemps cantonné au domaine du merveilleux. Mais le progrès de l’appareillage scientifique et la modernité positiviste conduisirent nombre de savants à s’intéresser à cet étrange phénomène. Tombait-elle du ciel, émanait-elle de la terre ou était-elle suée par les végétaux ? Le texte de Jamin, professeur de physique à l’École polytechnique et membre de l’Académie des Sciences, est un savoureux compte rendu des différentes approches scientifiques de l’obscure rosée. Un livre clair, démonstratif, didactique : « Cela prouve qu’on peut être bien près d’une vérité sans la voir et toucher à des découvertes sans le savoir et sans les faire » ; « Ce qui fait le caractère particulier des sciences d’observation, c’est qu’elles ne résolvent une question que pour en poser une autre ». On y apprend que l’air est « diatherme », c’est-à-dire transparent pour la chaleur ; que, comme la terre, « la lune reçoit une provision annuelle de chaleur qui fondrait 32 mètres de glace à sa surface » ; que c’est par la rosée que la terre se défend contre les envahissements du froid. Salvatrice rosée. Un mémoire dont les derniers mots « tout semble obéir aux lois mystérieuses d’une harmonie préméditée » renvoient à la capacité d’enchantement des perles de la rosée, et à leur intact pouvoir poétique.
La Rosée de Jules Jamin
(suivi d’une étude de Philippe Blon et avec des dessins de Jean-Jacques Rullier)
Éditions VillaRrose, 125 pages, 9 €