Avoir la langue bien pendue, l’expression est justement employée quand on l’applique à l’héroïne de Ribeiro, Brésilienne de 68 ans ayant conservé ses charmes et décidée à conter, par le menu, les nombreux épisodes de sa vie sexuelle débridée. Nous sommes ici dans l’univers du roman, de la fantasmagorie, non dans celui d’une autofiction qui voudrait nous faire croire à la véracité d’un témoignage ; ceci même si une note préliminaire de l’auteur le dément, affirmant qu’il s’agit d’une bande enregistrée puis confiée à l’écrivain.
La narration progresse ici débarrassée de tout tabou. João Ubaldo Ribeiro nous convie à un grand moment de liberté consacré tout entier à l’activité sexuelle, chaque scène subissant un filtre déformant puisque c’est l’homme l’écrivain qui laisse parler une femme la narratrice en lui. L’univers fantasmatique masculin attribué à cette Brésilienne se développe heureusement avec beaucoup d’autodérision. Le mâle est traité avec autant d’amour que de mépris. « Il m’a demandé si, à mon retour, je lui donnerais une chance pour de bon et je lui ai répondu tiens prends un acompte fourre ta main sous ma jupe glisse-la dans ma petite culotte pétris-moi bien les fesses pointe un doigt dans mon sillon, et il s’en est donné à main joie, si vous aviez vu comme il était allumé, il bavait… » Un roman drôle, érudit et inventif. Alchimie rare et revigorante.
Ô luxure
João Ubaldo Ribeiro
Traduit du portugais (Brésil)
par Jacques Thiériot
Le Serpent à plumes
256 pages, 7 €
Domaine étranger Les joies du sexe
avril 2004 | Le Matricule des Anges n°52
| par
Benoît Broyart
Un livre
Les joies du sexe
Par
Benoît Broyart
Le Matricule des Anges n°52
, avril 2004.