Ce premier roman, rédigé en forme de triptyque ainsi construit pour donner au lecteur un triple éclairage d’une même scène, celle de la mort du héros pourrait fleureter avec la peinture de mœurs, réaliste, violente.
Une graine de fasciste, fils d’une mère idolâtre mais castratrice, succombe à l’envie de fumer un joint. Ce bon enfant dirige par ailleurs un groupuscule extrémiste (et buveur de bières). Son second, son bras droit, quant à lui est homme de petites vues et grandes phrases, fanatique de surcroît ; il voit dans l’acte de son chef une déchéance et, convaincu de son bon droit, condamne puis exécute (au couteau, symbole ô combien avéré d’impuissance) le bien pauvre Tantale. Voilà nos protagonistes en place, s’y ajoute un inspecteur, témoin mi-outré, mi-tenté des aveux de l’assassin, et il y aurait sans doute là matière à faire du théâtre, un drame mais pas une épopée. Les trois parties du livre s’articulent tel un engrenage sordide ; entre la confession de l’exalté meurtrier/bourreau, les délires de la victime lors de son ivresse cannabique, et les pleurs hallucinés d’une sorte de sainte, génitrice d’un messie inconnu venu exhaler son dernier souffle au pas de sa porte, pour ne pas dire dans ses bras. Le lecteur a tout juste le temps de découvrir une triple misère : de cœur, d’esprit et d’âme, dévoilée sous ses plus pathétiques aspects.
La prétendue transposition du mythe d’Actéon reste un bien faible prétexte à ce livre, dont la langue n’arrive que rarement à hauteur de ses visées. Pourtant l’originalité de la construction, et la justesse des situations peintes présageaient d’un talent virulent, qui reste à confirmer.
La Mort d’Actéon de Bernard Dilasser
La Différence, 95 pages, 12 €
Domaine français Un mythe de trop
janvier 2004 | Le Matricule des Anges n°49
| par
Philippe Castells
Un livre
Un mythe de trop
Par
Philippe Castells
Le Matricule des Anges n°49
, janvier 2004.