Le premier livre de Marie Cosnay, née en 1965, est un long poème dans lequel une question lancinante, secrète, va être posée. Une voix, prometteuse, s’ouvre sur l’histoire d’un amour disparu, peut-on penser, lors d’un accident de la route. Le visage de cet homme ne reste là que dans le souvenir éclaté de moments, de gestes, jusqu’à même s’inscrire dans des sensations presque abstraites. On pense parfois, tant les temps narratifs sont croisés et cadrés telles des photographies, à La Jetée du cinéaste Chris Marker, ou encore, à cause de la lenteur sourde des questions (filiales, paternelles, celles des rapports entre homme/femme) au Retour passeur du poète Jean Daive. La gravité du livre est contrebalancée par une économie de langue manifeste, laquelle a l’efficace de nous confronter au retour d’une vérité simple, celle d’une mémoire de l’autre impossible à effacer : « Forcenée je veux tirer l’eau le visage/ qui dort./ Je pense que c’est notre mesure de passer/ la mesure, s’efforcer, s’appliquer avec/ du courage à fonder ce qui était/ premièrement debout (…) ».
Que s’est-il passé ?
Marie Cosnay
Cheyne éditeur
80 pages, 13,50 €
Poésie Que s’est-il passé ?
juillet 2003 | Le Matricule des Anges n°45
| par
Emmanuel Laugier
Un livre
Que s’est-il passé ?
Par
Emmanuel Laugier
Le Matricule des Anges n°45
, juillet 2003.