Dans son F2, Christophe Honoré possède une bibliothèque dans la pièce principale et des étagères dans la chambre où les livres, plus nombreux, font un muret tout autour du matelas.
Le premier que l’écrivain saisit est un ouvrage de photographies qui montre l’érotisme des ados utilisé à des fins commerciales par notre société si bien pensante : The Perfect Childhood de Larry Clark, photographe et réalisateur estampillé sex, drug and rock’n roll… Des livres de cinéma, Truffaut, un Cassavetes couché sur la dernière étagère. Honoré désigne le dernier roman d’António Lobo Antunes, N’entre pas si vite dans cette nuit noire dont le titre a servi pour un « panneau » de Cécile Cassard. « Ça fait trois, quatre ans que je lis Antunes. La force des voix chez lui m’a touché. Moins ses thèmes. » En riant, il saisit Belle du seigneur : « Oh, il n’a lu que dix pages ! » Puis sérieusement « c’est juste un livre que je ne peux pas lire. » En revanche, précieux pour lui Les Tragiques grecs, un gros volume en Livre de poche et Antigone de Sophocle en plusieurs traductions. Là, c’est un guide de la Grande-Bretagne où il a trouvé une photo du port de Scarborough, « je ne sais que ça de Scarborough ». Un meuble est réservé aux CD. Un foutoir assez éclectique… Près de la télévision posée à terre, des cassettes de Cécile Cassard : ce sont les rushes.
L’essentiel se trouve dans la chambre qui s’ouvre sur Nietzsche, Guyotat (Eden, Eden, Eden), Angot (« Christine, je la lis vraiment souvent, j’aime beaucoup. Ses livres me donnent de l’énergie. ») Denis Cooper avec Closer (« Mon Américain préféré »). Puis l’écrivain saisit un roman chez Minuit : « c’est le livre que j’ai le plus lu. Une vingtaine de fois. » C’est Récidive de Tony Duvert, « j’ai lu d’autres trucs de lui, mais leur côté Matzneff m’emmerde un peu. » Geneviève Brisac (« profondément je suis persuadé que c’est un grand écrivain. ») Bataille, bien sûr. La Bible de Frédéric Boyer. Les ouvrages s’entassent en piles sur la moquette, « je ne respecte pas les livres ». Il y a là les ouvrages « dans lesquels je me plonge le plus » : la poésie (Reverdy, Michaux, Rimbaud…) et le théâtre (Koltès, Marivaux, Tchekhov). « Mes bibles en terme de cinéma : Serge Daney pour L’Exercice a été profitable, Monsieur et Rossellini pour Le Cinéma révélé ». À quatre pattes sur son matelas, Christophe Honoré fouille sous les Guibert, Sarraute, Rilke, Pasolini. Kevin Canty a servi aussi pour Cécile Cassard avec son Étrangère en ce monde. Les livres, déplacés, s’entassent sur le matelas. Ça pourrait ne jamais...
Dossier
Christophe Honoré
Pelletées de livres
septembre 2002 | Le Matricule des Anges n°40
| par
Thierry Guichard