Albert Paraz (1899-1957) est un énergumène. Romancier, polémiste, peintre-faussaire, épistolier, jettatore et coureur de jupons, cet homme a fait du pétard puis, comme la tempête, s’est tu. Quarante-cinq ans après sa disparition, Jacques Aboucaya lui consacre à juste titre une première biographie -Paraz avait signé lui-même Deux autobiographies brèves (Le Fourneau, 1983)-offrant une documentation inédite qui éclaire nettement la figure de cet ami du maréchal Juin, de Mandiargues et du jeune Boudard. Naguère, Jean-Paul Louis a publié les premières pièces du dossier (Du Lérot) ainsi que la fameuse correspondance Céline-Paraz (Gallimard, 1999) où il apparaît que si le premier doit beaucoup à Paraz, militant ardent pour le retour du proscrit et pour son oeuvre, Paraz doit à Céline de n’avoir pas été tout à fait oublié, et ce malgré les qualités de son oeuvre savoureuse, enthousiasmante.
Après avoir fréquenté souvent les tribunaux, il a essuyé les rigueurs de la « justice » littéraire. Grande gueule vacharde et naïve à la fois, il n’aura raté aucune occasion de pousser le bouchon. Témoin, sa préface au Mensonge d’Ulysse du révisionniste Paul Rassinier qui n’enrichit pas une bibliographie ambiguë : « rebelle » ou d’esprit indépendant, Albert Paraz aura signé des chroniques dans Je suis partout et Rivarol tout en collaborant à Défense de l’homme, organe de l’anarchiste pacifiste Louis Lecoin. En fait de carrière littéraire, Paraz fut tôt salué avec Bitru ou les vertus capitales (1936) et Les Repues franches (1937), deux romans hauts en couleur, tout à fait fascinants qu’il faut lire à tout prix. Mais Paris est une fille frivole, elle se lassa du trouble-fête. Paraz disparut de la scène et poursuivit à Vence son oeuvre qui prit peu à peu la forme d’une perpétuelle « Défense de Céline » et donna lieu à des ouvrages hybrides comme Le Gala des vaches (1948) et Valsez, saucisses (1950) où il mêlait avec un beau talent le diaire, les fragments de correspondances et les attaques drues. Paraz est un intouchable incontournable.
Paraz le rebelle
Jacques Aboucaya
L’Âge d’Homme
160 pages, 21 euros
Histoire littéraire Paraz la tempête
juin 2002 | Le Matricule des Anges n°39
| par
Éric Dussert
Un livre
Paraz la tempête
Par
Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°39
, juin 2002.