La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Théâtre Une robe d’éternité

février 2022 | Le Matricule des Anges n°230 | par Laurence Cazaux

Quand la mort provoque l’exhumation de secrets trop lourds à porter.

La Nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé

Les secrets de famille, les mensonges, les blessures émotionnelles hantent les textes du dramaturge québécois Michel Marc Bouchard. Sa nouvelle pièce est de la même lignée, son décor raconte combien elle est singulière : « Une salle clinique d’embaumement, blanche, dépouillée. Au fond, la porte des toilettes avec un logo pour handicapés. Tout près, le four crématoire. D’un côté, les réfrigérateurs à cadavres. » Un décor tout blanc pour faire se côtoyer la mort, les excréments et l’embaumement.
Mireille, une célèbre thanatopractrice qui embaume les rois et les stars du monde entier, revient dans son pays d’enfance après une très longue absence. Sa mère vient de mourir. Elle veut s’occuper de son cadavre : « Dans les sociétés anciennes, les membres des familles participaient à la préparation du corps. C’était une façon symbolique de prendre soin de la personne aimée, une dernière fois. Une façon symbolique de lui dire merci, une dernière fois. » Mireille a fui sa famille des années plus tôt, porteuse d’un très lourd mensonge. Enfant, elle était insomniaque et aimait épier les gens du quartier dans leur sommeil. Comme le dévoile l’auteur dans une préface : « Elle a été amoureuse, a aimé le corps endormi de Laurier Gaudreault, mais à son réveil, et à l’inverse du conte, ce prince-à-la-double-vie a emporté la jeune fille dans les abysses du mensonge. » Cette cérémonie d’embaumement va provoquer des retrouvailles familiales houleuses. Mireille va se confronter à ses trois frères et à sa belle-sœur. « Je devrais te poser plein de questions. “Qu’est-ce que t’es devenue depuis une décennie ? ” “As-tu quelqu’un dans ta vie ?” Des questions normales. “As-tu fait bon voyage”…” Des questions comme ça. Mais il m’en vient juste une ; qu’est-ce que t’es venue faire ici ? » Et surtout qu’a raconté Mireille à sa mère lorsqu’elle lui a téléphoné à l’hôpital peu de temps avant son décès ? Et pourquoi, quand sa mère est morte, avait-elle les deux mains collées au visage, comme si elle ne voulait pas voir quelque chose ou quelqu’un ? La famille veut comprendre : « Qu’est-ce que tu es venue faire ici, Mireille Larouche ? On t’écoute ! C’est quoi ton show de croque-mort de riches ? On t’écoute ! Penses-tu vraiment que notre mère aurait aimé ça ressembler à une de tes vedettes embaumées ? Qu’elle aurait aimé ça se perdre dans une montagne de fleurs ? Se vautrer dans une robe qui vaut deux fois plus le prix de son ancienne maison ? Qu’elle aurait aimé ça être entourée de sa famille déguisée en soirée de gala ? C’est quoi tout ça, Mimi ? C’est quoi la raison du “spec-que-tacle” ? » De ce huis clos familial va naître la vérité sur la nuit du drame, celle où Laurier Gaudreault s’est réveillé.
La pièce est construite en deux parties, une première partie avec l’arrivée de Mireille et l’embaumement de sa mère, pour nous exposer la situation et nous présenter les différents personnages de cette famille éclatée, et une seconde partie qui se déroule pendant la cérémonie de l’enterrement, où la vérité éclate au grand jour. La narration est très tendue, comme dans un thriller psychologique. En même temps l’auteur prend un malin plaisir à mêler les registres. Le linge sale se lave en famille alors que Mireille pare sa mère d’une robe splendide de grand couturier. L’humour côtoie le trivial avec des histoires de pelleteuse ou d’allergie alimentaire et de mayonnaise pour le repas de la cérémonie d’enterrement, ou encore d’alerte sur le portable de l’un des frères pour les meubles de la défunte déjà mis en vente sur eBay… Mais à de rares moments, le temps se suspend, histoire d’arrêter de faire du rien et du vide et de s’élever, un peu, spirituellement.
La Nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé est un très beau texte, la proximité avec la mort le rendant d’autant plus vivant et vivifiant. Une pièce à découvrir avant de la voir adaptée à l’écran par Xavier Dolan.

Laurence Cazaux

La Nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé
Michel Marc Bouchard
Éditions Théâtrales, 64 pages, 12

Une robe d’éternité Par Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°230 , février 2022.
LMDA papier n°230
6,50 
LMDA PDF n°230
4,00