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Domaine français Tuer le fils de Benoît Séverac

mars 2020 | Le Matricule des Anges n°211 | par Lionel Destremau

Benoît Séverac change de braquet. Après des romans noirs sociétaux tels que 115 ou Trafics, Tuer le fils place la cellule familiale au cœur d’un récit aussi sombre que prenant. Matthieu Fabas sort de prison, après une peine de quinze ans pour un meurtre homophobe commis afin de… montrer à son père qu’il était devenu un homme. Un père qu’il n’aura guère le loisir de côtoyer après sa libération, ce dernier étant bientôt retrouvé mort. Un décès suspect, qui ressemble à un suicide, mais qui pourrait être un meurtre qu’on a voulu maquiller. L’inspecteur Cérisol et ses deux acolytes, Nicodemo et Grospierre, ne s’y trompent pas : il va falloir creuser l’affaire. Le fils de la victime est un assassin tout juste libéré, c’est donc vers ce « coupable idéal » qu’il se tourne rapidement. Mais encore faut-il extorquer des aveux…
Il y a donc une enquête, des indices, parfois subtils, disséminés au fil du roman. Mais ce n’est pas tant la résolution de l’énigme qui va importer, que tout ce que va drainer l’histoire familiale de Matthieu Fabas. Pour ce faire, Benoît Séverac alterne les modes narratifs. D’une part, il nous livre le journal de Mathieu, écrit en prison à la suite d’un atelier d’écriture, retrouvé sur la scène de crime. D’autre part, des chapitres consacrés au père, sa passion pour les grandes figures nazies, ses dettes de jeu, son appartenance à un gang de bikers, sa violence et sa dureté, mais aussi à la vie intime du policier Cérisol, son épouse devenue aveugle, son rapport au couple, à son propre manque de paternité. À travers ces différents éléments, Tuer le fils se densifie, prend de l’ampleur, sort du cadre du seul récit policier, pour toucher à des registres émotionnels et psychologiques qui découlent d’une foule de questionnements : la quête identitaire, l’altérité, le rapport à l’éducation et aux normes sociales. Mêlant part d’humanité parfois lumineuse, tentative de rédemption grâce à l’écriture, et regard porté sur une douloureuse relation père-fils, Benoît Séverac donne un roman noir abouti qui sonne juste.

L. D.

La Manufacture du livre, 290 pages, 18,90

Tuer le fils de Benoît Séverac Par Lionel Destremau
Le Matricule des Anges n°211 , mars 2020.
LMDA papier n°211
6,50 
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