Jenni Fagan raconte l’adolescence, les mal-être, la vie en marge. Son premier roman, La Sauvage (The Panopticon en VO) lui avait valu une inscription sur la liste Granta des meilleurs jeunes écrivains britanniques. Les Buveurs de lumière devrait consolider sa place. C’est un roman de fin du monde, mais sans la désespérance. Une histoire de silence et d’espaces immenses, étouffés par la neige qui tombe et s’amoncelle, de plus en plus haut.
Dans le nord de l’Écosse, à Clachan Fells, un iceberg s’approche et les températures ne cessent de chuter. La population s’organise. On ferme les écoles, les appels à la vigilance se multiplient. Rien de brutal, que de l’ordinaire.
Dylan McRae, doux géant, expulsé de son cinéma d’art et d’essai londonien après le décès de sa mère et sa grand-mère, s’installe dans une caravane du camp de Ash Lane. Il y rencontre Constance et son manteau de loup, son don pour la survie, et Stella sa fille, qui était un garçon. L’âme du récit. Avec ses angoisses – ne pas grandir, retarder l’inéluctable –, écho singulier à celles de ce monde qui sombre, L’écriture est rapide, émotionnelle, avec cette manière très singulière d’aller déterrer des ressentis enfouis, de poétiser le réel. « Il y a trois soleils dans le ciel et c’est le dernier jour de l’automne – peut-être pour toujours. Chiens du soleil. Soleils fantômes. Parhélie. » Les Buveurs de lumière est une histoire d’amour, mère fille et fils et grand-mère. Une histoire lumineuse, alors que le monde s’efface. Jenni Fagan a ce don pour magnifier ses personnages, les poser juste à côté de la normalité, en léger décalage avec le réel. Et ce faisant, les rendre inoubliables. C’est le petit miracle de ces Buveurs de lumière : donner presque envie d’avancer vers le silence et le froid.
Julie Coutu
Les Buveurs de lumière de Jenni Fagan
Traduit de l’anglais (Écosse) par Céline Schwaller,
Métailié, 304 pages, 20 €
Domaine étranger Les Buveurs de lumière
octobre 2017 | Le Matricule des Anges n°187
| par
Julie Coutu
Un livre
Par
Julie Coutu
Le Matricule des Anges n°187
, octobre 2017.