Failles N°3
Dirigée par les frères Costanzo, Failles est une revue qui prend son temps : trois livraisons seulement en douze ans. Après Logiques politiques en 2003 et Situations de la philosophie en 2006, ce nouveau numéro interroge Existence et Inexistence dans un ensemble qui équilibre réflexions plutôt abstraites, la théorie disons, et pratiques de vie, avec cette fois une approche beaucoup plus concrète. Une quinzaine de contributions – transcriptions de conférences, témoignages, entretiens, essais… – font apprécier des expériences et des pensées politiques, artistiques, pédagogiques qui illustrent ou ouvrent la voie à d’autres manières d’être au monde. Bien que certains textes soient ardus sans une solide culture conceptuelle, l’ensemble reste accessible avec un peu de bonne volonté pour des lecteurs non-initiés. Si l’entrée en matière d’Alain Badiou, qui veut rien moins que « proposer un nouveau concept de l’existence », est escarpée, les textes des autres têtes d’affiche – René Schérer, Giorgio Agamben ou Jacques Rancière –, autour de l’utopie pour le premier et des formes du désœuvrement pour les deux autres, sont plus abordables. Empruntant la voie royale de la politique de l’émancipation ou des chemins parallèles comme ceux de la pédagogie alternative, convoquant les œuvres de Derrida ou celles, cinématographiques, de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, ce numéro brasse large, questionnant à chaque fois le statut des êtres, des choses et des normes, entre accommodation au réel et transgression plus ou moins radicale.
Anthony Dufraisse
Failles N°3,
Éditions Nous, 270 pages, 15 €