Kwak N°1
Dans notre époque si policée, l’appel au meurtre lancé par le numéro inaugural de la revue Kwak (le K final est inversé) a quelque chose d’engageant. Illustrations tirées des journaux à sensation fin XIXe siècle, porte-folio intemporel de Gérard Rondeau, dessins minimalistes africains de Guillaume Lecasble, vignettes de Loustal accompagnant de courts scénarii tranchants signés Elsa Marpeau : ce semestriel publié par les jeunes Éditions du Panama entend renouer avec l’éneaurme, le gênant, le brûlot anarchiste sous une forme sobrement classieuse. Sur le thème de l’Assassinat, il regroupe une quinzaine de nouvelles d’auteurs connus ou pas. Les femmes y ont la plume belle, énervée, meurtrière. Parmi elles, Fabienne Berhaud nous offre un assassinat domestique dans la cuisine, Yveline Méhat un jeu de langue décapant. « Ah ça, Cinna, encore debout ? Tu vas prendre racine. » Des essais mordants sur la fiction de « moi-nœuds » contemporaine de Jean-Baptiste Yvette et Denis Marquet achèvent ce pas vraiment révolutionnaire mais anticonformiste premier opus. « Quand ils sont tant à croire que la littérature consiste à laisser parler le moi, j’appelle écrivain celui qui pressent, soupçonne, s’effraye de ce vertige : quand je dis moi, je mens. »
Kwark N°1, 212 pages, 20 € (26, rue Berthollet 75005 Paris)