Il y a des écritures à mise au point automatique. Bloquées sur le grand angle, absorbées par la profondeur de champ, elles déprécient leur sujet. Nicole Malinconi réfute cette approche paresseuse. Elle sait la juste focale, les impératifs du cadrage et les nuances de la lumière. Son regard intègre se situe à hauteur d’homme. Son temps de pose est celui de la patience, mais sans excès. Depuis son premier livre, Hôpital silence (Éditions de Minuit, 1985), un florilège de saynètes inspirées par son travail d’assistante sociale dans un établissement gynécologique, cette intransigeance traverse son écriture sobre, épurée, tentée par le silence. Recueil composé d’une succession d’arrêts sur images et de visions fugaces, Jardin public réunit de brefs tableaux resserrés autour d’une impulsion initiale -une phrase volée, un regard fugitif, une attitude entr’aperçue. Dans ces visions, Nicole Malinconi consigne la bravoure du quotidien. Elle sonde les recoins inexplorés où se niche le « rien ou presque » de l’existence : la singularité d’un clochard « à l’allure bien mise » ; des voyageurs aux pensées en partance, en attente dans un aéroport ou une gare ; une « folle de la rue » en vagabondage ; des putes d’une maison close ; tous les habitants de l’ordinaire. Lauréate en 1993 du prix Rossel pour son roman Nous deux (Éditions Les Éperonniers), romancière et nouvelliste installée à Namur, Nicole Malinconi « livre à des tas d’inconnus la trace de quelqu’un d’autre ». Elle s’empare des solitudes qui nous indiffèrent. Elle se glisse dans la vie de gens qui ne sont pas déchirés « mais coupés aux ciseaux » (Roger Nimier). Si elle recolle les morceaux de ces destins inoffensifs, c’e
Jardin public
Nicole Malinconi
Le Grand Miroir
122 pages, 10 € (65,60 FF)
Domaine français Croquis de l’ordinaire
décembre 2001 | Le Matricule des Anges n°37
| par
Pascal Paillardet
Un livre
Croquis de l’ordinaire
Par
Pascal Paillardet
Le Matricule des Anges n°37
, décembre 2001.