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Domaine français Le marin d’Ardenne

mars 2000 | Le Matricule des Anges n°30 | par Thierry Guichard

En une dizaine de textes courts, Guy Goffette fait chanter sur le mode nostalgique le désir de partir et celui de rester. Entre Rimbaud et Verlaine.

S’il n’y a que très peu d’inédits dans ce recueil (malgré ce qu’une quatrième de couverture amnésique tendrait à affirmer), Partance et autres lieux mérite toutefois de figurer en bonne place dans nos bibliothèques. Guy Goffette s’est fait mieux connaître ces dernières années grâce à Verlaine d’ardoise et de pluie et Elle, par bonheur, et toujours nue.Récits qui suivaient la parution de recueils de poèmes comme le magnifique La Vie promise également chez Gallimard. Il était donc naturel aujourd’hui, que son éditeur reprenne des textes parus en revue (la Nrf) ou chez des éditeurs moins diffusés comme Théodore Balmoral ou L’Étoile des limites. C’est ce dernier qui nous avait donné à lire le récit qui ouvre Partance. Ici l’écriture caresse une intimité bordée de lyrisme, une confession rêveuse.
Partance est une caravane échouée au bord d’une route que l’écrivain a poussée au fond de son jardin où « le cerisier n’a jamais donné que des merles ». Lieu mythique de l’enfance que ce jardin, où Goffette, enivré des récits du grand-père marin, voyait et entendait la mer rêvée. Mais la mer dans les Ardennes ; pensez donc ! Partance, blanche sur le vert des herbes folles, accueille donc la solitude de l’écrivain et le regard curieux des vaches. Refuge de l’enfance et de la littérature, l’oasis fige le temps, rend acceptable le silence et l’immobilisme.
La cohérence de ce recueil vient du fait que Guy Goffette, sans cesse, nous parle de voyage. Et l’on entend le sang se précipiter dans les veines du poète aux seules évocations des horizons lointains, des femmes étrangères et de Rimbaud. Voyage immobile dans les premiers textes, mais c’est là qu’on le préfère car il est profond, sensible, émouvant. Figure du voyageur, le grand-père avec sa pipe d’écume offre à l’écrivain une ancestralité mythique sur quoi rêver. Mais comment courir les océans quand on aime tant les terres d’Ardenne ? On voit Guy Goffette dans le portrait qu’il fait du Marquis de Sy « qu’on imagine debout (…) déjà prêt à partir, rassemblant, découpant, agençant amoureusement ces cartes et gravures d’un monde proche ou lointain, qu’il caresse comme une femme. » Partance alors rime avec romance : les voyages se font dans l’imaginaire car « on ne naît pas impunément dans cette Ardenne-là » que l’on ne peut quitter sans éprouver « le sentiment d’un exil diffus, de plus en plus pénible, et une indécrottable nostalgie. »
Sur le territoire de l’enfance ardennaise coule la Semois dont la « peau n’a d’autres écailles que les reflets du jour (et) sa robe est tendre : une chair de femme qui ondule en marchant ». C’est sur les bords de cette rivière que le grand-père plantait son tabac et que l’enfant était Indien. Cela est raconté en une quinzaine de pages, Les Planteurs de fumée, qui sont un bonheur de lecture et de nostalgie.
Goffette est un tendre qui bout ; prêt à s’enflammer à chaque passante, il sait aussi, d’un trait se faire assassin : pour lui « les touristes (…) ont des yeux domestiques ». Cinglant ou nostalgique, l’écrivain fait de sa phrase « une chair de femme qui ondule » : son cours relie la forêt « où le cœur d’un enfant timide a battu sa première chamade » à la Roumanie où il vérifia devant le sort fait aux Tsiganes, que « le mot Libertate ne pouvait décidément rebondir qu’entre les murs de l’Université ».
On le suivrait ainsi longtemps, reconnaissant de donner à la langue française le journal du seul voyage inépuisable : celui de la littérature.

Partance
Guy Goffette

Gallimard
189 pages, 85 FF

Le marin d’Ardenne Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°30 , mars 2000.