Les nouvelles de Jean-Pierre Cescosse, qui s’apparentent à des chroniques, sonnent juste. Avec ces récits d’instants ou ces nouvelles plus thématiques, ce jeune écrivain qui a publié chez le même éditeur Rimbaud et le CAC 40 ne s’encombre pas de superflu. « Dans la vie, en général, on ignore les vaches. On a tort. On ne prête attention à ces bêtes que lorsqu’elles sont prises d’encéphalopathie spongiforme, car on les mange et on l’attrape. J’ai eu un copain qui a aimé une vache ; oui, la femelle du taureau ; le mammifère au pis. Je vous rapporte les faits. » Ce léger décalage initial que l’on retrouve dans d’autres nouvelles ne présage en rien de l’évolution de Vache sans suite qui ne sera en aucun cas fantastico-poétique mais au contraire absolument réaliste. Comme dans Concasseur, nouvelle pour laquelle on imagine d’abord un récit disons plus symbolique : « Au début de l’hiver, cette année-là, le père d’Antoine Freming était passé dans le concasseur. A la sortie il mesurait soixante centimètres. Un amas de chairs et d’os broyés : désormais, c’était ça, le père d’Antoine Freming ». En l’occurrence, on plonge dans la réalité sociale engendrée par le travail dans une usine produisant de la chaux, avec ses conflits sociaux et les répercussions lointaines d’un accident. Chômage, vieillesse, fausse-couche…, Jean-Pierre Cescosse égrène les sujets douloureux avec une justesse de trait qui colle à la réalité tout en conservant une légère distance plus pudique qu’ironique. Cet auteur combine parfaitement la précision et le « survol » propre à la nouvelle, on attend la suite.
Après dissipation
des brumes matinales
Jean-Pierre Cescosse
Le Dilettante
102 pages, 79 FF
Domaine français Presque l’air de rien
août 1999 | Le Matricule des Anges n°27
| par
Christophe Dabitch
Un livre
Presque l’air de rien
Par
Christophe Dabitch
Le Matricule des Anges n°27
, août 1999.