Europe N°962-963 (Ossip Mandelstam)
Le dossier que consacre Europe à l’un des plus grands poètes russes du XXe siècle, Ossip Mandelstam, comptera. Harcelé puis condamné à cinq ans de camp de travail en Sibérie, Mandelstam meurt en 1938 près de Vladivostok, assassiné en somme par le régime stalinien, non sans avoir laissé les plus puissants poèmes de résistance à l’écrasement (notamment les Cahiers de Voronej). C’est à la fabrication de cette langue, toute vouée à dire la tôle sur laquelle bat l’époque, à ses circonvolutions et à l’épreuve que cache « l’ombre de ses mots » (Marc Weinstein), que s’attache ce volume. Il faut lire les traductions de J.-B. Para du Compléments au Voyage en Arménie, l’article éclairant les rapports que le poète a entretenus avec son pays (« de l’air dérobé aux confins »), et les témoignages de deux ami(e)s proches, l’entomologiste Boris Kouzine (dédicataire du Voyage en Arménie) et Natalia Chtempel (« L’exil à Voronej »). Des textes sur l’influence qu’eut pour lui la culture française (dont Villon, les Impressionnistes), ou sur ses liens avec Khlebnikov et les formalistes créent là une véritable « politique de mandelstam », que le texte éponyme de Weinstein s’emploie à cerner parfaitement.
Europe N°962-963, 336 p., 18,50 €