Mortibus N°3 (Éros zéro ?)
En faisant réémerger des idéologies, des utopies, des penseurs entre autres des années 70, la revue Mortibus avance à contre-courant. Son troisième numéro interroge : Eros zéro ? En clair, l’augmentation de la durée du travail, le retour des religions et des ordres moraux, l’autoritarisme, la peur de l’autre et l’organisation de l’insécurité transforment-ils notre société en un univers érotique, sexuel, sexophile ou encore pornographique ? Roger Dadoun explique dans son très stylé « Z/éros pointés » qu’il s’agit du mouvement même de la vie et qu’Éros ne se réprime pas, ni ne s’éduque et que donc, camarade « il est toujours devant toi ». Il conclut par : « aujourd’hui le corps plein sans organes sur quoi tout s’inscrit, c’est l’Argent ». Claude Javeau, auteur de l’essai La Culotte de Madonna, surenchérit et évoque la sexualité de masse qu’il associe au peep-show : « Si le client a eu le temps, il s’est branlé ; sinon il retourne dans la rue acheter son journal ou un sachet de frites. » Il dénonce la standardisation marchandisée de la pornographie et l’érotisation de la mort, et affirme : « il n’y a pas que le génital… il y a une construction intellectuelle et affective du plaisir d’être avec, de penser à… » Fabien Ollier, le mentor de la revue, explique dans un parallèle entre sport et sexualité que « le sport moderne intègre le corps humain dans une course à l’exploit frénétique lors de laquelle se produit une désexualisation du sexe ». Poèmes, nouvelles, photos, peintures, dessins, collages illustrent les très polémiques, mais aussi très riches articles de ce numéro qui ressuscite la figure de Wilhelm Reich, chantre de la révolution sexuelle.
Mortibus N°3, 323 pages, 18 € (5, place Publique 60420 Dompierre)