La bibliothèque d’Olivier Rolin c’est son appartement du 6e arrondissement parisien. A croire presque que le plafond repose sur ces rangées de livres qui s’étirent le long des murs de chaque pièce. Dès l’entrée, des romans, posés sur une table, rangés le long d’une bibliothèque constituée de simples planches. La cuisine, sur la droite rappelle que nous ne sommes pas dans une bibliothèque municipale… Le bureau de l’écrivain a investi la plus grande pièce dont deux murs sont couverts d’ouvrages. Deux montants de portes, retournés et mis à plat sur des tréteaux servent de très longue table. Olivier Rolin semble préférer le bric-à-brac aux meubles de style. A l’autre bout de l’appartement commence un classement par ordre alphabétique des livres. Afin de ménager des espaces pour accueillir les nouveautés, certains sont couchés (ainsi La Société du spectacle de Guy Debord) offrant une drôle de partition. « Voyons mon ami Jean-Christophe Bailly avec qui cohabite-t-il ? Ah, lui s’en sort bien ; il est avec les deux seuls Balzac que je possède. Vous voyez je ne suis pas très balzacien. » A côté, le petit couloir sombre héberge livres d’histoire et revues.
Retour dans le bureau où l’ordre alphabétique cesse à Lyotard. Telle une tour de Babel, le reste de la bibliothèque révèle l’abandon de tout rangement malgré, ici ou là, quelques tentatives de classement (du côté des « r » les deux frères Rolin se côtoient). La table de travail s’est chargée de quelques livres austères : Marcellin, Tacite, Gibbon. Corpus des lectures nécessaires au projet d’Olivier Rolin d’écrire sur la décadence de Rome. Une autre pile de livres s’est érigée en vue d’une préparation à l’écriture d’un livre sur la Mer Rouge. Quelques Loti, des ouvrages ramenés du dernier voyage, des guides… Les grandes lectures : Shakespeare, Claude Simon, Malcom Lowry, Céline, Gibbon pour son Histoire du déclin et de la chute de l’Empire romain chez Robert Laffont (coll. Bouquins), Chateaubriand pour ces Mémoires d’outre-tombe, Stéphane Mallarmé, Paul Valéry, Blaise Cendrars pour Panama, Borges bien sûr, Tchekhov pour ses nouvelles, Lucrèce et Ovide surtout pour Les Tristes. Et Pierre Michon qu’Olivier Rolin aura nommé tout au long de l’entretien. Pas de livres de bibliophilie ou presque mais tout de même un livre sentimentalement précieux : Kiêu, le grand poème vietnamien de Nguyên Du. Un livre très rustique édité au Viêt-nam, d’autant plus beau qu’il représente un miracle vis à vis de la situation économique du pays. Dans un placard fermé, le Trésor. Une trentaine de dictionnaires des langues que manie Olivier Rolin : deux ou trois portugais, quelques espagnols, russe, anglais, allemand et même un mongol… Tout un monde et ses langues. L’Aleph, quoi !
Dossier
Olivier Rolin
Le rêve d’Aleph
octobre 1994 | Le Matricule des Anges n°9